Portrait

Publié le par Monique MERABET

Portrait

PORTRAIT

 

 

 

Soleil levant

transparence d’une goutte

soudain révélée

 

Une guêpe s’abreuve à l’eau perlant aux thunbergias. Dégradés de teintes sur le balcon – camaïeu ce serait plus joli – en bleu. Les corolles qui se fanent savent décliner les nuances, en inventer de nouvelles.

Si belles ! Comme ce rose impondérable de l’hortensia. Il est vrai que les hortensias sont experts en l’art de varier les tons à l’infini. J’ai un faible pour les hortensias. L’âge les embellit.

Peut-être me faudrait-il trouver mes rides et mes taches… jolies. J’allais écrire pittoresques.

Découvrir le pays de mon corps visité de soleil et de vent. De temps aussi. Le seul marqueur au temps qui passe : paysages de peau qui se transforment instant après instant.

Le sourire de l’amie que l’on n’a pas vue depuis longtemps et qui s’écrie : « Je t’ai reconnue » comme une prouesse réalisée, à laquelle elle ne croyait pas. Le sourire de l’amie rencontrée pour la première fois. « C’est ainsi que je t’imaginais ».

Mais les mots échangés par delà l’océan… les mots décrivent mieux qu’une photo, parfois.

Bann mo i sote la mér, i sote dirèk dann kër… bann mo fonnkër.

 

Ma mère et ma sœur

la même tache brune

à ma joue gauche

 

Grain de beauté sur ma main, celui de Grand-mère, naevus à mon bras : signes de reconnaissance, signes identitaires. Cette impression forte d’appartenir à une chaîne, courroie de transmission qui jamais ne se brise. Mes gènes éparpillés depuis le commencement se retrouvent en chaque humain qui viendra. Peu importe le cursus de sa procréation.

Mes mots pour transmettre l’irréfragable sentiment d’être humain.

 

Les mots pour me dire

trâlée de lettres violettes

chassant la fourmi

 

(Monique MERABET, 28 Janvier 2014)

 

 

 

Publié dans Haïbuns

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
M
Haïbun très touchant. Très intéressant ce que tu dis sur les paysages du corps. Moi j'aime les corps marqués, ils racontent de belles histoires (http://www.papillonsdemots.fr/2012/08/26/le-corps-des-femmes-iii-peau-et-chair/)<br /> Moi aussi les marques identitaires me sont chères. Je partage une tache de naissance avec mon frère et ma soeur.
Répondre
D
Un bien joli haïbun encore, léger et profond à souhait.
Répondre
D
Ne fais pas attention, Monique. Je suis d'une grande étourderie..
M
Bien sûr Danièle... Mais l'Echo N° 41.... J'en étais restée au N°10! J'aurais doormi tout ce temps-là? <br /> Bises.
D
Tu feras peut-être profiter &quot;L'écho&quot; de ce beau haïbun, tellement dans le thème du n° 41 !
M
Merci Danièle de prendre le tems de me lire... même en vacances.
M
Les signes identitaires sont importants ; bien souvent l'atavisme intervient. J'ai apprécier l'entièreté du .texte.
Répondre
M
Merci Marcel. Je retrouve en moi des caractéristiques physiques de ma mère et aussi des gestes, des attitudes... de mon père.