bravo
BRAVO
Sur mes membres nus
les bravos mouillés des fleurs
… ou leurs lazzis
gouttes en accroche-cœur
faut-il vraiment passer là ?
Qu’elles sont jolies les fleurs tombées de la dernière pluie, étalant à ms pieds leurs robes emperlées. Hier, je voulais toutes les photographier.
J’applaudis à la grâce de celles qui se dessèchent en une multitude de petits êtres de légendes : origènes, céphalophores, plutôt : c’est ainsi qu’on nomme les fleurs présentant une figure humaine. J’ai envie de tous les recueillir ces farfadets aux silhouettes de danseurs, figés là dans un mouvement délié, dans un geste d’offrande.
Offrir ce qu’ils ont de meilleur, cela semble être la mission de ces baladins de la grâce et de l’élégance. Elle est si petite, la corolle momifiée ! Si svelte dans sa posture de gisante ! Parfois, elle prend la forme d’un insolite fruit confit, gélifié pour l’éternité.
Bravo ! Bravo !
Mon admiration va encore à ces feuilles jaunies, ces rameaux brunis, peuplant le jardin de marionnettes d’ombres, sorcières prêtes à s’envoler sur le balai d’un rayon de lune vers ces contrées galactiques que seuls mes rêves atteignent.
Les ombres qui n’attendent qu’un malencontreux coup de vent pour s’agiter dans l’obscurité, pour qu’une petite fille aux yeux de lune se demande si, sur le mur, là, ce ne serait pas le reflet d’une plante de l’autre côté de la nuit… Mélange de frayeur et de fascination : tapi dans la pénombre… Non, ce n’est pas le chat !
Ce n’est personne, ce n’est rien de connu, sinon un fragment de peur cristallisée qui met frissons à mon bras et à mon âme.
Bravo aussi pour ces mystères là ! Bravo et merci pour la balade de nuit, pour la balade de jour !
Ce matin, le vent fait sa razzia parmi les fleurs du buis de Chine, écloses avec la pluie d’hier. Déjà ! Destin de fleur, juste le temps d’un rai de soleil, d’une brume. Comme vous l’assumez bien, ô sœurs éphémères, vous qui ne vous rétractez même pas lorsque mes doigts raidis effleurent vos pétales de lumière !
Bravo et merci pour votre compatissante beauté !
(Monique MERABET, 5 Mars 2015)