cibler
CIBLER
L’oiseau réfléchit
bien cibler le grain de riz
de son déjeuner
mon café vite avalé
la première gorgée… Pfutt !
Faut-il donner un but à sa journée ou bien se laisser porter, voyager à la rosée des choses ? Comme dans ce voyage vers la lune imaginé par Savignien de Cyrano de Bergerac… où le carburant se compose de rosée. Sûr qu’un tel fluide est susceptible de nous emporter loin, très loin des contingences terrestres.
Faut-il avoir pour objectif d’aller décrocher la lune ?
Je tombe sur ces belles paroles de sagesse d’un éphéméride à colorier : « Ton chemin est ton but ; profite de la promenade »
Donc, la vie… rien à cibler ?
Cibler, viser, but, objectif : ce sont les termes d’un vocabulaire de carrière (à faire) de fortune (à chercher), de marketing qui n’apporte guère que des satisfactions replètes et superficielles pour ceux qui thésaurisent, qui comptent en Suisse. Le mot « cible » est d’origine suisse, justement.
Pire encore : cibler sa proie, celle que l’on cherche à abuser, à leurrer. Publicité. Cibler son public, attenter à la liberté de penser autrement. Même en écriture… Littérature adulte ? Littérature jeunesse ? Pour quel âge ?
Écrire beau, écrire vrai, rester ouvert à tous les imaginaires.
L’oiseau du tanka m’a dit en rêve – en rêve je parle oiseau ! – que j’abusais de ma position « d’écrivain » pour raconter n’importe quoi. S’il (elle ? dans le langage oiseau le genre reste indéterminé) s’est laissé surprendre à piétiner sur le rebord de la mangeoire, ce n’était certes pas dans le but de choisir un grain de riz parmi les autres. Pour proférer des balivernes pareilles, je devais avoir une cervelle de… chat ! Non, ses motivations sont bien plus raisonnables et cela ne regarde pas une stupide « sans ailes » de mon espèce !
(Monique MERABET, 6 Mars 2015)