Lundi pluvieux
LUNDI PLUVIEUX
Rester zen
sous le gris du ciel
le béton
Lundi ? La main hésite… Impression de déjà vu, déjà vécu. Combien de fois ai-je formé ces lettres cursives l, u, n, d, i ? Ne sommes-nous pas un nouveau jour, aujourd’hui ?
Les mots en boucle, jours et semaines en cycles. Et la lune — Lundi jour de la lune, moon day — y accroche son immuable manège d’habillage/striptease : nudité — dans l’obscurité, bien sûr… la lune est pudique voire pudibonde — croissant, premier quartier, demi-sphère, lune gibbeuse, pleine lune et, à rebours, lune gibbeuse, demi-sphère, etc. Croissante, décroissante.
Ce matin, avec le ciel plein gris, résurgence des cris de martins, désolés, désolants. Où vont les martins tristes lorsqu’il fait beau ? Où vont-ils étouffer leurs discordants krouèk krouèk ?
Jours de pluie
sur le riz des moineaux
nuée de moucherons
Vite les piafs ! Venez profiter du supplément protéiné… si vos becs sont assez vifs pour les attraper au vol, bien entendu. Le riz a sûri peut-être, à cause de l’humidité.
Farine de pluie
faire le tour des iris
plaisant, n’est-ce-pas ?
La dernière goutte de café, tombant de la grègue (la verseuse dans laquelle j’ai réchauffé mon breuvage) fait naître un oiseau à la surface du café, apparition qui se résorbe rapidement, fantôme entraperçu, telle une réalité clandestine.
Analogie avec ce réveil en pleine nuit. Sans raison apparente. Sommeil rompu. Je me suis sentie visiteuse illégale, migrante venue d’une brèche entre les certitudes compactes du sommeil, fissure dans un rêve qui ne m’a pas retenue, que je n’ai pas voulu habiter. Je ne saurai jamais.
Seule dans la chambre
à être éveillée
les moustiques partis
Respirer. Espérer que revienne le mascaret de l’ensommeillement. Reprendre le cours de mon voyage de nuit.
(28 Novembre 2016)