Rêves croisés
RÊVES CROISÉS
Photographier les chats qui « chauffent soleil » sur le toit d’en face. Deux jaunes ; De la même famille ? Mère/fille ?
Au bilan de mon année d’écrivaine, les chats auront une place prépondérante. Tour à tour, je les ai admirés, enviés, contemplés, vilipendés — ô combien d’assiettes cassées, de poubelles éventrées. Ils m’ont amusée, réconfortée, inspirée : que seraient mes haïkus sans eux ?
Sur le dos, sur le ventre
deux chats jaunes m’observent
mardi au soleil
Les chats n’ont pas d’arrière-pensée — alors que je découvre celles, nauséeuses, si peu lumineuses du monde culturel réunionnais — ils vivent leur bien-être de l’ici et maintenant. Au soleil ou sur ma chaise.
Pensées félines
quand me laissera-t-elle enfin
mon coussin ?
Nos rêves se sont peut-être croisés quelques fois. Moi, chat jaune ou noir, poils et moustache ; eux, ils veulent devenir écrivain, « faner » leurs mots de chats sur le papier, se faire une patte bleue ou mauve suivant l’humeur du jour.
Moi, à rêvasser sur le toit au soleil d’un matin de Novembre. Me lécher les bleus à l’âme des trahisons journalières, des avilissements de leurs sourires entendus… tout faux, j’avais tout faux.
Mes regards d’envie
le chat jaune s’est choisi
une poche d’ombre
la vie n’est plus que l’attente
de ce qui ne viendra pas
Oh ! Minet, le sais-tu que cette chaise que tu guignes, que tu squattes, a cent ans ? qu’elle a été taillée dans le margosier (lilas d’Inde) de la cour de Ravine-Sèche où vivait Grand-mère Aglaé, veuve de guerre et ses trois enfants ? que la veuve et les orphelins s’étaient faits gruger par un menuisier peu scrupuleux…
Bah ! Tu préfères guetter les oiseaux.
Au jardin rêver
de selfie – sur mon bras
l’ombre d’une guêpe
(22 Novembre 2016)