Les arbres m'appellent
LES ARBRES M’APPELLENT
Infos du dimanche
les hérissons disparaissent
marquer d’une croix
Ne pas marquer d’une pierre blanche, cependant. D’ailleurs, après l’avalasse abattue sur nous, toutes les pierres de mon jardin ont pris cette teinte grisâtre de moisissure. Même (et surtout) les fragments de corail que je pose un peu partout… rappel que l’île est aussi née de la mer. Il faudrait les brosser.
Aucune autre tâche ne me vient à l’esprit. C’est dimanche, le jour de Dieu, le jour où l’Éternel se reposa de sa création. M’agacer de la mouche qui bourdonne, du balai du voisin…
Me focaliser sur les arbres, les herbes couchées ; les herbes m’appellent*. Pas pour me demander mon aide. Elles plient mais ne rompent pas et cela ne les gêne pas de pousser autrement. Seuls les arbres ont gardé trace du passage de la tempête : l’air un peu penché de l’araucaria, le papayer affalé sur la serre de la voisine, le pied mourong tout déplumé…
Le manguier sans mangue
comme si de rien n’était
racines gorgées d’eau
J’ai ramassé les mangues vertes tombées, inutilisables ; je m’étonne de l’air détaché qu’il affiche. Le regret est pour moi. L’arbre, lui, a la conscience tranquille : il a infusé ses courants de sève aussi souvent qu’il l’a fallu ; il a porté de lourdes grappes de fruits, transmis ses gènes de chair sucrée au cœur de chacun des noyaux. Le reste appartient au jardinier, aux oiseaux, aux escargots… au temps qui passe.
(21 janvier 2018)
*les herbes m’appellent, une ligne d’un haïku de Niji Fuyuno ; c’est aussi le titre d’un ouvrage que les Éditions Liroli ont consacré à la haijin disparue.
Fête du printemps —
Du fond de l’eau
Les herbes m’appellent (Niji Fuyuno)