Gravé dans le tronc

Publié le par Monique MERABET

Gravé dans le tronc

GRAVÉ DANS LE TRONC

 

 

 

Brise venant d’est

l’ombre du benjoin s’agite

avant l’avocatier

 

L’arbre tire sa substance de l’invisible, de la lumière. Mystère de Création. Étonnements du réel… respecter la laïcité.

En tout cas, c’est pour ces découvertes que j’aime malaxer la terre avant de planter : recherche de l’origine de vie, contact avec le vivant.

Mes effarouchements de petite fille touchant un ver de terre — Berk ! gluant, rampant… — ont fait place à l’émerveillement.

Une poignée de terre un fragment de ciel… si riches de promesses. Et l’histoire d’une petite graine de rien du tout, grossissant, tirant sa nourriture d’atomes d’azote ou de minéraux, sans que la terre du pot diminue de volume. Juste un tassement au cours du temps. Biner. Remuer.

De l’infiniment petit peut surgir un géant, tronc, feuilles, fruits. Si haut vers le ciel.

Cimes attrape-nuages pour arroser la terre, attrape-rêves pour la contemplation. Arbre toujours sacré, d’essence impénétrable à l’esprit humain ; magique, si on veut.

Une forêt, un verger. Une idée d’immensité déjà, un goût d’infini, une invitation au voyage lorsque s’envole un oiseau ou une abeille, une nostalgie lorsque tombe une feuille. La conscience que, sur cette terre, nous ne sommes pas éternels. Ce qu’il nous est donné de vivre est à la semblance de ce destin de limbe balloté par le vent, par le temps.

 

l’arbre vénérable

reconnaître l’oiseau gravé

au tronc scarifié

 

Parfois une silhouette, un visage comme ceux qui se dessinent sur la rétine lorsque l’on a fermé les yeux : ancêtres reconnus ou inconnus.

 

(3 juin 2018)

Publié dans Automne ou printemps

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