La gloire du kassi
LA GLOIRE DU KASSI
Dentelle verte
kassi au fond du jardin
où es-tu oiseau ?
Hier je regardais les kassias. Envie de m’enfouir dans la mousse des feuillages. Envie de me revêtir de leur mousseline vert d’eau si légère qu’on ne saurait l’effleurer… encore moins la froisser.
Penser que l’oiseau chanteur ou le papillon s’y posent sans rien endommager de la fine structure des limbes.
Voilà ce que je partage avec vous, oiseaux et papillons !
Ineffable bruissement dans la brise, balançoire souple résistant à l’alizé tournicoteur.
Attendre que le soleil vienne y jouer pour la photo, ombres se rajoutant à la dentelle délicate, la projetant sur les larges feuilles du bananier proche.
Kassi, kassia, faux acacia, faux mimosa : plante fourragère, la préférée des cabris des zones sèches. Devenu plante envahissante… mais je me demande si ce n’est pas syndrome d’îlien, cette propension à se sentir « envahi »…
Puis viendront les fleurs, pompons crème comme ceux du mimosa ; ils me font penser à ces gadgets, boules de verre se remplissant de flocons lorsqu’on les agite.
Après la floraison, apparaîtront des gousses plates aux grains d’un vert translucide : régal d’enfance, au grand dam de Grand-mère qui craignait l’empoisonnement. Sont-elles vraiment toxiques aux humains ?
Du coup, mes festins qui bravaient l’interdit avaient quelque chose de clandestin, un parfum d’aventure… toutefois maîtrisée puisque je me restreignais à n’en consommer qu’avec parcimonie.
Aujourd’hui encore, je ne peux m’empêcher d’y goûter. Et entre deux élagages — Madame, sa mi koupe, sa i sèrv pa rien — je conserve précieusement mon bosquet au fond du jardin…
Bruit de tronçonneuse
avec les kassias s’en va
un peu de l’enfance
Parfums et saveurs d’un vert paradis.
(12 juin 2020)