Dimanche par procuration
DIMANCHE PAR PROCURATION
Des étoiles partout
papillotant dans mes yeux
je retourne à la nuit
Mon haïku pastiche de Santôka :
Des lucioles partout
je suis retourné
dans mon village natal
La nuit n’est pas mon village natal mais un séjour où je m’attarderais bien parfois. Insomnie due au vent qui fait grincer quelque chose de métallique (rouillé ?) ou peut-être seulement le frottement de branches sur le toit.
Bête en fil de fer
entre les tiges de papyrus
un liseron dessine
Une minuscule fourmi court sur la page blanche sans laisser de traces. Ah ! Trempez-la dans l’encre bleue, trempez-la dans l’encre violette ! afin de suivre les entrelacs de son chemin sur le papier. Il m’est insupportable que sa calligraphie me reste imperceptible. Inaccessible en mon cahier !
Elle est passée par ici, elle repassera par là… mon stylo n’est pas assez véloce pour matérialiser son empreinte.
J’ai changé de plume sans plus de succès. Finalement, je me dis que coller aux déplacements de la fourmi, ce serait lui aliéner sa liberté. L’observateur perturbe l’évènement en cours par sa simple présence. Alors s’il s’agit de fouiner…
Imaginer plutôt la cartographie du monde parcouru par l’insecte : îles d’eau, bordées de ruisseaux, rivages se confondant aux sentiers… une espèce d’univers flottant. À l’image de ma pensée qui vagabonde, funambule sur le fil d’une insomnie éveillée. Et cette envie de me rendormir, de faire basculer le jour dans la nuit.
L’air déjà moite
je suis fleur
désirant la pluie
Me contenter de buller. Oui, je sais, on n’est pas dimanche. mais rien ne m’empêche de transgresser l’ordre des jours, de décréter un dimanche échappant à la régularité du temps comptabilisé.
M’accorder un dimanche buissonnier ? J’en bâille déjà.
(16 mars 2021)