Dimanche on tourne... les pages (7)
LA HORDE DU CONTREVENT
(Alain DAMASIO)
Un livre fantastique, inracontable, inclassable… Un livre qui décoiffe, qui emporte, qui tourbillonne…
Un tel livre, c’est pain béni pour les chroniqueuses poussives qui peuvent arguer du caractère insaisissable de cette histoire de vent force extrême et poser là, leur plume, sans état d’âme.
Et puis, n’est-ce pas ? il ne faut pas déflorer les subtilités du récit, ne pas dévoiler les péripéties de cette quête pas comme les autres.
La Horde du Contrevent m’a été révélée par une amie et, de bouche à oreille, je sème la bonne nouvelle aux amis lecteurs. Du coup, je me sens investie de la mission de ne pas trop en dire, de tenir ma langue sur la fin (les fins) de cette aventure située « dans un espace imaginaire » comme dirait un de mes petits-neveux qui commençait ses histoires de cette façon…
Euh !... à propos, Monsieur Damasio, il est absolument indispensable de l’écrire, la suite ! Pitié pour le pauvre lecteur lambda qui a basculé dans votre monde fantastique pour quelques jours, pour quelques heures et qui en a émergé, l’esprit tout ébouriffé et qui ne rêve que de retrouver… Chut !
Faut vous dire, cher auteur que tout le monde n’a pas votre génie de création ni l’art de tenir hors d’haleine ceux qui ont eu le privilège de tourner les pages de ce livre.
Pour étoffer un peu ma chronique, je vous livre la quatrième de couverture. Je sais, je sais, Google vous dira tout, tout, tout, sur la horde et son narrateur. Mais, c’est pour le fun, pour garder une trace d’une lecture formidable. Voici :
Un groupe d’élite, formé dès l’enfance à faire face, part des confins d’une terre féroce, saignée de rafales, pour aller chercher l’origine du vent. Ils sont vingt-trois, un bloc, un nœud de courage : la Horde. Ils sont pilier, ailier, traceur, aéromaître et géomaître, feuleuse et sourcière, troubadour et scribe. Ils traversent leur mnde debout, à pied, en quête d’un Extrême-Amont qui fuit devant eux comme un horizon fou.
Expérience de lecture unique, La Horde du Contrevent est un livre-univers qui fond d’un même feu l’aventure et la poésie des parcours, le combat nu et la quête d’un sens profond du vivant qui unirait le mouvement et le lien. Chaque mot résonne, claque, fuse : Alain Damasio joue de sa plume comme d’un pinceau, d’une caméra ou d’une arme…
Chef-d’œuvre porté par un bouche-à-oreille rare, le roman a été logiquement récompensé par le Grand Prix de l’Imaginaire.
Et pour mon plaisir personnel, cette page traitant de… livres. Peut-être est-ce ce genre de passages qui m’a tant fait aimé « La Horde »
« La tour d’Ær est faite entièrement de livres, mademoiselle, des fondations aux lauzes du toit. Chaque bloc de la paroi est un livre, chaque latte du plancher, chaque surface verticale ou horizontale. C’est la seule bibliothèque du monde qui ne soit faite que de livres. Mais dans leur écrasante majorité, ils n’ont pas de pages. Ils sont gravés sur des briques d’argile ou de gypse, dans le marbre, sur des cubes d’étain, des plaques d’argent et de bronze, des billes de chêne puis insérées dans le mur de la tour… »
« Ce fut là tout le génie du concepteur de la bibliothèque, je pense, un génie qui n’est plus vraiment compris aujourd’hui. Par ce choix de n’accepter que des blocs, il savait que les livres qui lui parviendraient seraient éminemment denses. Il savait que la contrainte de graver lettre par lettre et l’espace exigu favoriseraient une expression contractée à l’extrême, une pensée ramassée, hautement vitale, aphoristique. »
(Monique MERABET, 10 Février 2013)