Souvenir de comptes (Geneviève GONZALES)
(Geneviève GONZALES)
Vous avez dit contes ou comptes ? D’instinct je me suis méfiée de ces hiéroglyphes qui s’alignaient, s’additionnaient, se soustrayaient. Mais lorsqu’ils se sont mis à se superposer pour former des fractions, des équations, et j’en passe, ils ont hanté mes nuits de mercredi à jeudi car, ce jour-là, Claudine ou Jacques s’occupaient de mon cas. J’en étais vraiment un. « Réfléchis » jetait l’une sèchement tandis que l’autre tirait tantôt sur la natte droite, tantôt sur la natte gauche. Alors, quand de hiéroglyphes les chiffres devaient devenir des courbes qui n’avaient rien d’artistique, c’était un cauchemar. Ils m’ont poursuivi longtemps avant de disparaître de mon horizon.
Quel bonheur de pouvoir se plonger dans cet univers où les mots s’ajoutaient aux mots, quelle que soit la langue. Ils devenaient images et musique sous la plume d’écrivains ou de poètes célèbres ou obscurs. Mais ce temps béni a duré bien peu de temps.
Par vengeance peut-être avec une sorte de ricanement, les chiffres ont réapparu sous la calculette du banquier qui les alignait en colonnes, nombreux dans celle des moins, pour un seul petit dans celle des plus. Eh voilà ! Les tourments des comptes étaient revenus. Alors maintenant, si vous pouvez additionner des mots sans me lasser pour faire des contes, épargnez-moi la migraine avec les comptes.
Combien de tresses?