Accommoder les restes
ACCOMMODER LES RESTES
Fleurs au buis de Chine
dans la liane Saint-Jean
oiseaux acrobates
alerte sur ma tablette
urgent : sauvons la forêt
Batifolant dans le bleu du clérodendron, les oiseaux font du manguier, l’arbre-joie. Tout là-haut se balance, la mangue mûre. Tombera-t-elle avant qu’un merle vorace vienne faire ripaille de chair jaune et parfumée ? Ma part de saveurs, celle que me laisseront les becs.
De l’autre côté de la maison, les restes de riz nourrissent les piafs. Les oiseaux viennent en nombre, troupe de saltimbanques dans le benjoin et sur le fil. Seule à profiter du spectacle, je révise mon vocabulaire : salto, salto arrière, axel, double-axel…
Les gens de la ruelle passent leur chemin vers l’école, la crèche, le bureau, l’atelier… Pas le temps, pas le temps !
Courir pour travailler. Je suis en marge. Je vis en marge, bonheur de retraitée : assise à attendre que m’arrive le parfum des fleurs de jasmin nées de la dernière pluie. Ah ! Il me faudrait arroser un peu…
Une passante derrière la clôture, parle, volubile. Sans doute dialogue-t-elle avec son portable. Parle à mon smart-phone, rendez-vous sur Facebook… Vie virtuelle dont je suis en marge, aussi. « C’est à partir de 70 ans qu’on est vieux », me dit-il. Bientôt, l’année prochaine.
Les fleurs du buis si blanches à regarder. Va donc les sentir… Il me reste la meilleure part. M’accommoder des restes.
(22 novembre 2017)