Volubilis
VOLUBILE
De la liste des dix mots choisis cette année pour la francophonie (accent – bagou – griot – jactance – ohé – placoter – susurrer – truculent – voix – volubile) j’ai retenu ce « volubile », à cause du liseron, bien sûr.
Le liseron est volubile. J’aime la définition botanique du mot : se dit d’une tige grêle qui ne peut s’élever qu’en s’enroulant autour d’un support.
Liseron
qui s’appuie à l’autre
liseron
Volubilis ! sa fragilité lui donne sa force et son exubérance. Le support une fois trouvé, rien n’arrête le liseron dans sa progression verticale ou horizontale. En un rien de temps, il est capable de vous bâtir une voluptueuse rotonde pitaclée de trompettes azurées. Alé di partou ! À pleine voix… pas question de susurrer…
De même qui peut arrêter la jactance du volubile qui dessine ses paroles en les modulant du geste et de la voix ?
Donnez-moi un point d’appui, et je soulèverai le monde, promesse jaillie de la truculence d’un physicien ambitieux. En effet, pourquoi s’arrêter à un caillou lorsqu’on peut déplacer une montagne ? Il suffit d’un peu de foi.
Tant de mots s’étirent
sur ma page volubile
ne dire que joie
Mon écriture — à l’encre bleu liseron — sur la page offerte : mots qui s’enroulent, qui enserrent, qui enrobent les pensées du jour. Les mots s’envolent, explosent en mille éclats. Auront-ils jamais la grâce des fleurs du volubilis, cet accent indéfinissable, tendre et grave et léger à la fois. Les mots ne se faneront-ils pas en placotage, vain bagou de charlatan des mots, sans consistance ni conscience ?
Se laisser guider par le liseron sage qui taira ses fleurs fanées ; son chemin ne s’arrête que pour l’oiseau.
Autour du pylône otour lo poto
un liseron grimpe, grimpe in lizron i liane, i grimp
et l’oiseau soudain aguète ! in zoizo
(in Au bout de l’index, éditions Liroli 2015)
Ohé moineaux et tourterelles ! Et vous, cardinaux !
Laisser le chant de l’oiseau venir jusqu’à moi, rompre la rumeur du quotidien pour un silence mélodieux d’échos ; les laisser me raconter, diserts griots, le monde que mes yeux ne voient pas.