Sauvez une grenouille

Publié le par Monique MERABET

Sauvez une grenouille

SAUVEZ UNE GRENOUILLE

 

 

 

Mur d’en face

la lumière dessine

des ombres

 

D’étranges animaux… Un peu plus loin, la silhouette pariétale du dodo gris. Des oiseaux, des lézards à deux têtes, qu’aucun prédateur ne chassera. Sinon un nuage ou un hypothétique coup de peinture fraîche.

Le monde change. L’ombroiseau hoche la tête, picore l’ombrherbe. Et tout est à nouveau là, inentamé.

Retour à l’immobilité. Comme ces automates mus par quelques tours de clé, jouets d’autrefois. Le ravissement de l’enfant quand ils s’animaient : sautillements, pirouettes, kaskou (galipettes)…

Je me rappelle aussi ces tonbé-levé, poupées assujetties à une calotte semi-sphérique et qu’on ne pouvait maintenir couchées. Poussah.

Les ombres sont maintenant descendues, cachées dans l’inextricable réseau des tiges : cherche et trouve d’autres formes, d’autres combinaisons. Vitrail de palmes qu’un coup de vent anime de fantômes furtifs, à peine feuilles, presque oiseaux.

Calligraphies enchevêtrées qui ne veulent plus rien dire, qui peuvent tout dire. Kanjis à déchiffrer, espère, crois, avance…

 

Fouillis de tiges

la grenouille du papyrus

ouvre ses yeux ronds

 

Hommage à Bashô. Les grands poètes sont là pour qu’on les imite. mais mon haïku fac-similé ne plaît sans doute ni à l’amphibien, ni au haïjin. Je viens de signer une pétition « Sauvons les coassements ! »

La bestiole disparaît. Plongée vers le bas. Pourvu que le chat ne la débusque pas, lui qui aime à se lover dans la terre sèche des pots.

Tenir la terre humide. Sauver une grenouille.

 

(30 septembre 2018)

Publié dans Habiller la lune

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article