Crépuscules
CRÉPUSCULES
Soir qui tombe
ces figures grimaçantes
aux troncs ébranchés
Peut-être sont-ils en colère ces arbres étêtés, peut-être ressentent-ils comme mutilation cet élagage qui ne leur laisse qu’un tronc totem dressé attendant l’offrande d’un nouveau printemps. Je ne sais rien des sentiments des arbres, de la sève rémanente qui sait qu’elle connaîtra résurgence à la prochaine pluie. Pour l’instant, ces figures réelles ou chimériques sont là pour alimenter mes cauchemars de post élagage.
Peut-être n’est-ce que ma lassitude se projetant sur eux, les nimbant de papillons noirs, cette lassitude qui me guette à chaque tombée du jour : tant de chaleur, tant de soucis, ont érodé mes pensées, asséché le sol du jardin, desséché ma peau et mes cheveux…
Et ce phénomène d’une dilatation du temps et de l’espace, creusant la séparation avec le monde des autres, mes heures comme rejetées de Dieu et des humains lorsqu’on n’est plus que chair suante, que gosier assoiffé, cerveau embroussaillé d’où n’émerge plus aucune poésie.
Ailleurs le ciel est plus doux, la fraîcheur plus reposante. Ouvrir la fenêtre et respirer les premières étoiles et la lune… même si elle ne se montre pas.
Ciel étoilé
l’eau ruisselant sur mes bras
vaisselle du soir
Prendre joie de la journée par les deux bouts. Matin et soir se rejoignent dans les températures adoucies, pensées lustrées à l’innocence d’un réveil ou au sommeil apportant rêve et oubli.
Gommer cette angoisse des heures sans pluie. Ne pas attendre : de la paume de l’arrosoir déverser la goutte du colibri. Elle est nécessaire, elle est espérante.
Songer une fois de plus à déplacer les plates-bandes de belles de nuit, à débarrasser la vigne des lianes adventices.
Liserons -
les souhaiter là-bas
pas ici
(14 novembre 2018)