Combien de fourmis
COMBIEN DE FOURMIS
Page blanche
les mots qui viendront
en couleurs
Orages de nuit, pluie du matin. Les oiseaux reviennent se disposer sur une portée de fils électriques, animant l’horizon. Ils attendent le soleil. Ils savent qu’il refleurira. Les oiseaux n’ont pas de doutes ; leurs chants montent, clairs et puissants.
Si petit l’oiseau…
d’un chant unique
il emplit la maison
Mes mots tentent de lui répondre ; ils cafouillent un peu ; ils s’essoufflent trop vite, ils ne sont pas à la hauteur d’une seule de leurs notes.
Mes mots ne sont que fleurs des champs. Pas même… une herbe légère, flottant, laissant son erre d’encre sur le papier. Une graminée, fanant ses graines minuscules qu’aucun oiseau ne picorera. Mais que la fourmi humera avant de se dépêcher pour atteindre les marges, retrouver la paix du blanc.
Lectrice de Braille
a-t-elle senti la fourmi
au bout de ses doigts ?
Je songe à V. aveugle de naissance qui écrit hardiment un roman en Braille. Est-ce un exploit ? Pour moi, il est déjà hautement louable de savoir rassembler suffisamment de mots pour une œuvre romanesque. Quel que soit le langage utilisé, la gageure est la même, la joie aussi quand l’ouvrage s’accomplit.
Oh ! Combien de fourmis à rencontrer, à éviter pour une page d’écriture ! Encore un des avantages d’écrire à la main, de pouvoir lier l’abstraction des mots au concret des pattes de l’insecte ou à la graine d’un liseron vous bombardant de derrière le paravent.
Suis-je certaine que cette incursion interactive ne se réalise qu’en mode écriture manuelle ?
Coin d’écran
ne pas écraser
le moustique
(8 janvier 2019)