Acte 70, scène 119
ACTE 70, SCÈNE 119
Page blanche
quelques blancs nuages
traînent encore
Écrire les nuages, alors… ou attendre la perfection d’un ciel bleu quand s’effaceront les étranges êtres de brume.
Attendre le rien. Néant difficile à supporter par l’âme qui n’aime pas le vide trop proche d’une absence, de ce qui nous manque.
Toute une philosophie cependant. Atteindre une plénitude de vacuité : oxymore qui traduit bien le caractère inatteignable de la beauté immuable.
« Je hais le mouvement qui déplace les lignes », clame Baudelaire.
Moi, je me méfie de ce qui est figé, rigide, lisse, même en beauté. J’ai toujours préféré les gâteaux ratés, mal levés, boursouflés lors d’une cuisson à la marmite. Braises dessus, braises dessous. Lesquelles s’éteindront en premier ? Lesquelles auront besoin d’être attisées à grands coups de capeline, faisant s’élever un maelstrom de fumée dans la cuisine au bois.
Toujours revenir aux images de l’enfance… Mais quel avenir raisonnable imaginer lorsque l’on a soixante et dix ans ?
Quant au présent, Pfuit ! Aussi instable que ces nuages, justement. Le ciel brumeux d’il y a une demi-heure, a changé. Le temps d’écrire…
Le ciel bleu
et tout se remplit
de lumière
Soleil pâle envahissant l’écran d’un mur où se projette — acte 70, scène 119 — un épisode de ma vie, celui du lundi 29 avril 2019. Comédie, tragédie, suivant l’humeur, suivant la capacité de résistance au temps et à ses aléas.
Clap d’une goutte.
En un lieu, en un jour, que de balancements, de micro changements ! Au ciel et sur la terre. Sur la véranda où j’écris dans l’alcôve d’un paravent. Alcôve : un de ces mots qui voyagent.
Écrire en alcôve
arabe, espagnol, français
koman i di an kréol ?
Justement, mon paravent est sculpté de ramages en moucharabieh. Et mon mini jardin de quelques pots se prolonge verticalement de l’ombre de feuillages venus d’ailleurs, de l’extérieur. Patio.
(29 avril 2019)