Flocons de ciel
FLOCONS DE CIEL
Méditer
sur une phrase de Bobin
quand tombe la pluie
« Il nous faut naître deux fois pour vivre un peu. Il nous faut naître par la chair et ensuite par l’âme. Les deux naissances sont comme un arrachement. La première jette le corps dans le monde, la seconde balance l’âme jusqu’au ciel. »
(Christian Bobin dans La plus que vive)
Avancée de brume
se détachant des montagnes
un nouveau monde
Méditer. Et ne rien écrire. La pensée de Bobin se suffit à elle-même…
Rumeur de ville
j’entends la mer gronder
ou les pneus qui chuintent ?
Qu’importe ! Qui m’empêche de poétiser, d’attribuer le bruit à l’océan tout proche ? Une rue à descendre… Je sais sa présence, son ressassement.
Kosa in shoz ? In sézi i bate é i robate ? (Qu’est-ce que c’est ? Un tapis qu’on secoue sans cesse ?)
Devinette créole pour dire le mouvement perpétuel, le balancement propice à la méditation. La mer, lieu pour naître et renaître, corail ou coquillage.
Aux Seychelles on a lancé une opération « Adoptez un corail » afin de réensemencer les barrières coralliennes dégradées. Renaissance. Réparation.
Naître animalcule, renaître fleur.
Naître corps, renaître âme.
Et la pluie qui fait naître/renaître pousses nouvelles, graines qui germent. Le bon grain et l’ivraie, différenciation humaine. Pour les insectes, chaque plante est nourriture, abri, nichoir.
Il pleut il mouille
au pied de l’avocatier
œufs d’escargots
Tout à coup, s’inquiéter des liserons, de leurs fragiles corolles pastel. Courir à leur rencontre. Flocons de ciel bleu mis à notre portée.
Droits sur leurs tiges
liserons après la pluie
sans un faux pli
Les gouttes leur tombent dessus si doucement. Délicatesse d’une bénédiction.
(10 mars 2020)