Semeuse de bon grain
SEMEUSE DE BON GRAIN
Lumière poudrant
un pan de la montagne
une certaine heure
le radioréveil immuable
marquant un temps factice
Cadran solaire grandeur nature… l’heure où le soleil atteint un point bien précis, varie à chaque jour qui rallonge.
Profiter maintenant de ce pailletage lumineux ; bientôt, je ne l’apercevrai plus dans cet état. La barre du jour de plus en plus tôt et moi de plus en plus lève-tard, les yeux collés de sommeil, peinant à extirper mon corps de ses lambas de nuit pour affronter le frisquet du matin nouveau.
Délice, cependant, ce petit coup d’air vif qui tapote les joues, le nez… et les mains… et les pieds… Alouette… Alouette.
Plante pailletée
comme l’étoile initiant
une voie lactée
Je regarde les graines se former à la plante ti-roulète. Penser à les recueillir, à les semer quelque part au gré d’un carré de sol ou d’une potée accueillants.
Ce matin, j’ai envie d’être semeuse de n’importe quoi — tout est bon au jardin du ciel —, carotte sauvage ou mauvaise herbe ou coquelicot… Devenir l’assistante du vent et des oiseaux.
Et vous, nuages qui folâtrez là-haut, n’avez-vous pas aspiré quelque semence venue de lune ou d’étoile ou, plus prosaïquement de la terre lorsque l’eau s’est sublimée en brume ? Et, dites-moi, est-il vrai que vous pouvez pleuvoir grenouilles et crapauds ?
Semer un pommier entre pied letchi et pied longani ; j’ai laissé quelques noix au pied du margosier.
Cinquante ans déjà
échappant à ma mémoire
feuilles du noyer
au jardin provençal
abritant une balançoire
Imaginer l’oiseau pays, merle, martin, tourterelle, découvrant l’arbre inconnu : peut-on y construire un nid ?
(21 juillet 2020)