Date maloya

Publié le par Monique MERABET

Date maloya

DATE MALOYA

 

Améthyste 21,

 

Mes sentiers d’améthyste et de pleine lumière

En de glauques étangs se sont parfois perdus.

Rejoindront-ils un jour l’ultime, la première

Source où j’abreuverai mes désirs éperdus ?

Étoile où j’ancrerai souvenirs éperdus ?

 

20-12-20 : date palindrome. Porte-bonheur. Date maloya pour se souvenir d’une histoire collective. Abolition de l’esclavage qui n’en finit pas d’être proclamée. Quand la déclarerons-nous effective, une fois pour toutes, incontestable sans qu’il soit possible d’y revenir avec des mais et des si ? Comme pour la guerre, qui demeure croûte boubou que l’on gratte et fait saigner, encore et encore.

 

Après 1848

mon aïeule Noire épouse

mon aïeul Blanc

 

20 décembre 1848 : le décret d’abolition de l’esclavage enfin proclamée à la face de tous, Noirs et Blancs et Métis.

Mais la vie n’a pas attendu la permission pour réunir les contraires, abolir les différences vaines.

 

Danse…

Pour l’avenir de ta métisse descendance,

pour l’alchimie d’une subtile coexistence

du noir et du blanc

(extrait de « Danse nègre », L’île du non retour)

 

Danse maloya pour es deuils collectifs ou plus intimes… Danse mêlant corps et âmes, sueur et pleurs. Gestes jaillis du plus profond de nous. Pulsion de vie venue du fond des âges.

Fonnkèr est sa musique, mêlant oulèr et kayanm, battements des cœurs en harmonie.

Héritage de nos ancêtres marronnant leur liberté, leur identité d’humains, leur dignité arrachée. Un peu de leurs gènes en moi, une poussière restée sur mes sentiers. je suis fille des Hauts, des pitons et cavernes, notre tremblotante essence réunionnaise cachée là, aux replis des cirques restés intouchables, dans les zavan dont les voix me hantent parfois.

Alors, dansons maloya devenu patrimoine de l’UNESCO.

 

Danse…

Un jour viendra de palmes indélébiles

inscrites au ciel

d’un Vingt Décembre de soleil et de joie,

une nuit d’espoir où ton maloya

sublimera l’étincelle d’une liberté promise

sur cette terre, par ton labeur, conquise,

et que tu reconnaîtras.

(extrait de « Danse nègre »)

 

20 Décembre, notre histoire à tous !

Fête kaf qui a mis le temps pour émerger de sa clandestinité méprisée… comme s’il y avait honte d’être esclave.

 

Marron pourchassé

il était auparavant

prince des forêts

 

La honte est du côté de ce code noir qui a voulu défaire point après point, sa tunique d’humanité.

Je citerai ce passage éclairant la difficulté de nous extraire encore aujourd’hui de cette gangue d’asservissement.

 

Mépris proche du dégoût pour ces soirées d’oubli et de liesse où se retrouvaient les déshérités du quartier. Danse de sauvages, maloya qui faisait se trémousser son père et sa mère ! Dans n livre, la légende sous l’image : « Les esclaves africains se réunissaient parfois pour danser sur des rythmes qui n’avaient rien perdu de la sauvagerie de l’Afrique. »

 

(Extrait de la nouvelle « Je suis belle mais je suis noire », Némésis et autres humeurs noires, recueil de Monique Séverin, Éditions L’Harmattan, 2020)

 

(20 décembre 2020)

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M
Oui, chère Monique, la honte est du côté du code noir... Dans notre "île du non retour", évoquée si magistralement dans l'ouvrage du même nom, nous débarrasserons-nous des "défroques dérisoires", endossées après nos "tuniques d'inhumanité" ? Je veux croire que nous sommes à tisser nos habits de lumière...
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