Dialogue sans paroles
DIALOGUE SANS PAROLES
Bulbul es-tu l’ange
qui m’a vue sur le balcon
verser l’eau de vie ?
Comme à son habitude, le bulbul s’est posé sur la plus haute branche ; il a bien raison, plus près du soleil, c’est la meilleure place, celle que j’aurais occupée…
Dialoguer en silence avec l’oiseau est le meilleur moyen de joindre la terre au ciel, de communier à ce nouveau matin.
Oiseau matutinal, as-tu rêvé d’atteindre ce là-haut extrême, d’aller voir au-delà des nuages si la lune n’a point laissé quelques brillants pour nous guider ?
Mais l’infini de ton espace te suffit et tu ne te laisses pas piéger par ces trompe-l’œil. Tu vis en canopée, bien au-dessus de nos banalités et des atrocités que couve le monde, trente-sixième dessous. Rien ne peut altérer la pure lumière de tes pensées.
Penses-tu un peu à moi, silhouette floue ? Vois-tu mon geste pieux, l’arrosoir qui verse… C’est pour toi, quand je n’y serai pas.
Prends bien garde aux chats ! Ils empruntent sans vergogne la voûte du buis de Chine, vert sombre constellé du vert plus clair des pousses nouvelles. Est-ce aussi à cette éclaboussure de teintes tendres que tu vois le printemps qui vient ?
En bas, tout m’échappe avec le temps qui va, avec la vie qui bat plus lentement à on pouls. Et cet enserrement du béton…
Béni soit ce jardin, dont nous jouissons encore ! Tu habites l’arbre totem que nous partageons, ce vieux manguier à l’écorce craquelée que j’espère voir fructifier cette saison.
Bulbul tu t’envoles
les plumes ébouriffées
m’as-tu entendue ?
(24 août 2021)