Mai en septante
MAI EN SEPTANTE
Branche chantournée
cyprès que le pêcher oblige
à faire un détour
Mois de mai qui va sur sa fin. Et les rangements qui ne font que s’esquisser. Pourquoi cela me tracasse-t-il autant ?
Parce que je sens qu’il va falloir prendre des décisions, trancher… ce à quoi je ne suis jamais prête. Ma nature procrastinative se rebiffe, se hérisse, se racoquille.
Et puis, soyons logique : débarrasser un coin, n’est-ce pas en embarrasser un autre ?
Regards vers le ciel. Décidément, les martins — bec jaune, œil jaune — ont du blanc au plumage. M’aura-t-il fallu tout ce temps de vie pour m’en rendre compte ?
Tant de choses, dont je ne prends conscience qu’à la septante : sur moi, sur les autres, sur l’environnement, la lucidité en phase croissante.
Septante : je veux parler de mes années septuagénaires ; l’expression « à la septante » ‘est venue spontanément, je la trouve jolie.
Hum ! Qu’en dit Google ? La Septante (S majuscule) désigne une traduction en grec de la Bible Hébraïque… je n’ai rien à y faire. Passons à moins érudit : septante = soixante-dix, et on peut parler de quelqu’un allant sur ses septante… Pluriel cette fois ! Bah ! Cela me rassure néanmoins : mon accroc à la linguistique est moins important ainsi.
Côté langue, je ne devrais pas me soucier de paraître iconoclaste, usant de petites touches de créolisme ou de néologismes qui me semblent mieux adaptés à ma pensée. On ne peut se prétendre écrivain si on ne bouscule pas (voire dynamite pas) la langue !
Est-ce cette liberté, ce vavangaj à travers la graphie ou le sens que j’avais particulièrement aimé et souligné dans ce recueil poétique « Des forêts d’oiseaux dans le crâne » (Renée-Lise Jonin, Flammes vives) ?
C’était en 2011 et je ne retrouve aucune trace de l’article écrit alors. Ce qui est certain c’est que cet ouvrage est resté tout ce temps sagement rangé sur une étagère accessible, rayon de mes « livres préférés ». Je l’ai relu avec plaisir et retrouvé l’enchantement des poèmes de l’autrice qui aime jouer avec les mots, avec les instants de la vie.
Je le remettrai soigneusement sur son étagère. Je ne me séparerai pas de ces mots-oiseaux semblables à ceux qui me viennent parfois.
Comme l’autrice :
« Me perblurent mon horizonce / Les questions sans réponses / Le néant qui reste béant… »
(30 mai 2023)