Photo de tronc avec trou
PHOTO DE TRONC AVEC TROU
Lumière de mai
elle brouille les figures
vues hier au tronc
Je n’ai pas distingué tout de suite l’accroc à la chemise d’écorce, une écaille tombée. En y regardant de plus près, je me suis demandé si ce trou ne révélait pas une cavité labyrinthique au sein de la vieille souche laissée là, après l’élagage du manguier.
Le manguier est arbre sacré, arbre de mystères et d’antique sorcellerie, celle que l’on attribue à son origine africaine. N’a-t-il pas abrité toutes les entités animistes importées avec les esclaves qui se sont vus dépouillés de ce qu’ils avaient de plus intime ?
Au bord du trou on voit encore comme un opercule, une fenêtre d’écaille restée béante. Intentionnellement, gamberge mon imagination ?
Cette nuit, quelque chose s’est échappé du tronc pourrissant. Une âme d’ancêtre piégée là a tenté de s’extirper du bois mort, l’esprit tutélaire du manguier cherchant à retrouver puissance (et pérennité) dans le bouquet de feuillage plein de sève resurgi au sommet.
S’est-il simplement réveillé pour une petite balade, comme le ferait propriétaire quittant son gîte pour aller respirer l’air de la nuit ?
Ah ! Peut-être aussi, est-ce invasion programmée d’extra-terrestres, ectoplasmes aux formes diffuses, aux contours fuyants, se faufilant hors de leur cachette. Tremblez, Humains !
Je me souviens d’une série télé où les envahisseurs nous arrivaient via soucoupes volantes larguant cargaisons de gousses sarcophages ; sans doute une astuce pour échapper à la longueur des voyages sidéraux, qui verraient succomber les astronautes de l’impossible. En éclosant, les coques libéreraient… nos envahisseurs. Cela me terrifiait.
Et pendant que je gamberge, imaginant fantastiques histoires, bouche bée devant les mystères insondables de cet accroc à un tronc mort…
Pieds dans l’herbe
ma contemplation suspendue
trâlée de fourmis
(12 mai 2024)