Clérodendrons et pivoines

Publié le par Monique MERABET

Clérodendrons et pivoines

CLÉRODENDRONS ET PIVOINES

 

Clérodendron rouge

jusqu’où est-il donc allé

dans la nuit de mai ?

 

La plante recouvre mon jardin de ses lianes envahissantes, parfois tonnelle improvisée entre maison et avocatier, parfois rampantes aux tentacules auxquels je me prends les pieds… Chaque jour, il me faut user du sécateur pour refreiner ses capacités d’extension : par exemple chaque nuit il avance vers l’étendoir à linge et je dois désenrouler ses lianes volubiles pour étendre ma lessive.

Mais qui se plaindrait de sa splendeur au soleil : rouges et longs pétales accompagnent les étamines hors d’un corset vieux rose rappelant le physalis.

Amour en cage… hum ! On dirait rubans aguicheurs dépassant d’une robe plus modeste et la botanymie créole s’en est inspirée en nommant la plante : « jupon de ma cousine », la cousine — on n’évoquera ni sœur, ni mère, ni fiancée, évidemment — donnant à l’expression une touche pour le moins coquine.

On imagine jeune coquette déployant ses appas afin d’attirer un mari. Dans notre petit monde réunionnais très versé dans le patriarcat, on sermonnait ainsi la fille dont le jupon dépassait de la robe : « Ou rode in bèlmèr ? » (Tu cherches une belle-mère ?)

Mais laissons-là les sous-entendus sexistes. Voguons vers plus chastes — c’est moi qui le dit — pivoines aux pétales resserrés en boule… inabordable.

 

Labyrinthe en pétales

l’abeille à la pivoine

s’en sortira-t-elle ?

 

La photo m’arrive d’un jardin picard, tout à fait en phase avec le kigo hémisphère nord proposé par Blandine qui précise : pivoines annuelles, celles qui joignent à l’élégance, la grâce d’être éphémères. L’abeille, grain de beauté, l’anime, tel le temps qui passe.

Oh ! Ni pivoines, ni clérodendrons ne viennent orner ces petits coins de tissus que ma mère ou ma grand-mère récupérait sur d’anciens vêtements et assemblait en tapis-mendiant. Le rouge ne se portait guère par les « femmes respectables », il était d’ailleurs couleur du diable pour ma grand-mère en habit de deuil perpétuel.

J’ai gardé une de ces couvertes de coins, elle me sert de couette lorsque vient l’hiver austral.

 

Couverte de coins

d’une robe de Maman

viennent les fleurs mauves

 

Je ne sais pas ce qui me réchauffe le mieux, de la teinte améthyste ou du souvenir de les avoir vues au giron de ma mère.

Artisanat toujours vivace sur l’île où il peut se décliner en artistiques patchworks. En trouvera-t-on un jour aux magasins exotiques qui s’installent en périphérie des villes de l’Hexagone ?

Lors d’un séjour en Charente, j’ai pu découvrir l’étal foisonnant de ces fruits, racines, condiments qui jalonnent quotidiennement les saisons de l’île tropicale où je vis.

Me rappeler cependant que tout ce qui est réunionnais est ressenti comme « exotique » alors qu’il ne convient pas d’inverser cet exotisme pour caractériser ces fruits (cerises, pommes…) venant de Métropole, de la France dèor.

Exotique pour qui ?

sous mes yeux les produits péi

du magasin de Niort

 

(2 juin 2024)

 

 

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