La gloire du benjoin

LA GLOIRE DU BENJOIN

Mandala

les fleurs du benjoin

rayonnant

Je les ai vues se former, se transformer. Au commencement couronnes de feuilles au bout des rameaux étagés, allure de candélabres. Puis aux aisselles des feuilles, comme le disent les botanistes, les tiges porteuses d’inflorescences : petits boutons de nacre s’épanouissant en étoiles, feu d’artifice.

L’apothéose des fleurs cosmiques si proches de la table où j’écris ; je ressens leur influence de muses bienveillantes et si mon écriture n’est pas à la hauteur de leur grâce, la pa zot lotèr.

L’arbre endémique atteint 40 m en pleine terre. Chez moi, il est devenu bonsaï, racines confinées et emmêlées au pot depuis vingt-cinq ans. Qui aurait cru qu’il puisse prospérer si longtemps !

Un quart de siècle d’arrosages et de compost nourrissant, mais aussi les négligences. N’ai-je pas mainte fois, laissé les feuilles se recroqueviller, se dessécher lors d’un hiver trop sec et venteux ? À chaque fois, le benjoin a montré résilience étonnante, ressuscitant sous la farine de pluie ou l’aumône d’un arrosoir déversé.

J’ai tenté de lui constituer petit jardin à son pied en y semant du persil, en y enfouissant graines diverses… plantations mises à mal par la présence des chats qui s’y lovent sans façon, sans respect pour les pousses qu’ils écrasent.

Il a connu d’autres vicissitudes comme cet étêtage précoce par un camion s’obstinant à circuler dans l’étroite ruelle ou encore ces écailles venues à son tronc, stigmates des griffes des félins le prenant pour arbre à jeux de chats.

Naguère — avant l’intrusion des chats de tous poils —, il a porté sans broncher mangeoires suspendues où s’ébattaient les oiseaux, il a accueilli les sarabandes de cardinaux, tourterelles, moineaux ou bulbuls, devenant arbre aux oiseaux, arbre chanteur froufroutant de battements d’ailes.

Je le vénère, arbre totem, arbre rassemblant carrousel de saisons.

Benjoin de juillet

feuilles et fleurs en couronnes

rose des bourgeons

folioles jaunies des fois…

arbre des quatre saisons

(18 juillet 2024)