Déambulation pour iris marcheurs
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DÉAMBULATION POUR IRIS MARCHEURS
Ousa i sava ? Les iris marcheurs
bann ziriss trinn voloyé voloyant sous la varangue
sou la varang jusqu’où iront-ils ?
Les iris de mon jardin, au joli nom de neomarica gracilis sont dits « marcheurs » car ils ont la capacité de s’auto marcotter ; au niveau des fleurs fanées, apparaît un keiki, un plant prêt à s’enraciner loin de la souche mère.
Ces végétaux auxquels je n’ai jamais vu de graines, ont développé un élégant et ingénieux moyen de se reproduire : la marche. Et, cela marche, il n’y a qu’è voir la marée verte colonisant mes plates-bandes !
L’iris posé sur le carrelage a peu de chance de s’y implanter. À moins de réussir à s’infiltrer dans le ciment d’une jointure, à l’image des herbes et fougères jaillissant des fissures des trottoirs.
Marcher est nécessité pour l’iris comme elle l’a été pour les hominidés s’aventurant hors de l’aire du clan, afin de coloniser l’ailleurs.
Je salue donc ces iris débordant sur l’allée, sur l’herbe, dans l’espoir d’agrandir leur territoire ; je salue leur témérité de pionniers, avançant de façon erratique, leur stationnement éphémère, là où le vent les pousse.
Empreintes mouillées Na poin pérsone ?
le visiteur laisse au salon lu la lès dann mon salon
un peu de lui… la bou son baskète
Après la pluie, il me restera quelques pétales filigranant les carreaux. Et aujourd’hui, il me reste ce verbe « voloyer » (du créole voloyé) qui pourrait trouver place au lexique français. « Voloyé » vient sans doute du verbe voler et indique un mouvement aléatoire, de ci, de là, sans savoir où se poser vraiment. Il a un sens un peu péjoratif pour désigner quelqu’un qui ne sait pas se fixer, qui ne sait pas ce qu’il veut : volyèr, voloyèz, un peu kavalèr, kavalèz…
Pour la plante, bien sûr, aucune connotation négative n’est de mise : c’est une question de survie pour ces iris qui ne vivent qu’un jour, le processus de pollinisation rendu impossible.
Ah ! N’est-ce pas point d’honneur de poète que de redresser les mots tordus, de ne pas les laisser se déliter en marigot humain ?
Ce vocable que l’iris a ennobli ce matin, j’en savoure chaque syllabe : vo-lo-yé.
Aura-t-on un jour le bonheur de voir inscrit aux futurs dictionnaires — wikitionnaires… ma fiy, diksionèr, sa na pu — le verbe « voloyer » ?
Ne servira-t-il qu’une fois, comme l’iris qui ne dure qu’un jour de ma fantaisie botanique ?
I rèss pa lontan Un jour seulement
pou guingne suiv an vavangaj pour suivre vagabondage
voloyèr d’in jour d’une fleur sans fruit
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