Dimanche, on tourne... les pages (37)

Publié le par Monique MERABET

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L’ARBRE SOLITAIRE

(Poèmes de Marguerite Baret-Léonard)

 

 

 

Journées du patrimoine. Journée de rencontres au jardin créole… si accueillant à l’ombre des grands arbres. Journée à déambuler aux quatre coins de ce vaste espace, zigzaguant d’un petit oratoire où cascadent des capucines aux coins sanctuaires embellis par la grâce d’un rose ineffable d’orchidée ou des taches d’un bégonia pintade, ou encore des feuillages délicats d’un mahot tricolore… jusqu’à l’éclat de pierreries des potées colorées de pensées.

Merveilleux jardin qui s’échappe librement dans l’air embaumé d’une boule jaune de mimosa, poussant vers le ciel tout bleu ses frondaisons de letchis centenaires abondamment fleuries, ses palmes là-haut, toujours plus haut, laissant flotter une escadrille de nids de belliers (tisserins) au bout des aériennes tiges des bambous.

Et puis le soir venu, découvrir les beaux poèmes du recueil de Marguerite Baret-Léonard :

L’ARBRE SOLITAIRE

 

Il suffit de tourner la belle couverture bleu nuit où une lune tutélaire veille sur un arbre à la silhouette amputée d’une moitié pour pénétrer dans l’univers émotionnel de ces chants de deuil.

 L’arbre mutilé, image nostalgique qui symbolise bien ces textes dédiés

Á celui dont les cendres furent données à la mer

Au temps des pinsons et des coquelicots 

La tonalité en est donnée : poèmes de recueillement et de mémoire pour dire l’indicible séparation d’avec un être cher, injustement, prématurément disparu et la douleur de l’absence, chaque jour renaissante.

Les vers de Marguerite Baret-Léonard se font incisifs, comme ciselés aux arêtes vives des lancinantes pensées de celle qui doit se contenter

D’interroger le ciel muet, obstinément.

En parcourant ces textes si émouvants, d’une sensibilité à la fois légère et percutante, on ne peut que se rappeler tous ceux qui nous ont trop tôt sevrés de leur tendresse et de leur présence, de ceux dont on sait que le deuil ne se fera jamais. Faire son deuil, expression abrupte d’un monde qui ne veut pas s’encombrer de sentiments, qui demande que chaque problème soit résolu. Mais ceux qui vivent si terrible déchirure savent

Qu’il soit jour ou nuit, il ne reviendra pas.

Et l’inanité de consolations maladroites de Vous qui chantez encore, qui riez et dansez. N’y changeront rien.

« Est venu le temps de sécher les pleurs

Viennent des soleils pour d’autres amours

Et des chants heureux par-dessus les fleurs »

Dit-on alentour.

Mais coule le temps et s’enroule l’eau.

Je ris bien parfois aux nouveaux matins

Mais vive est la blessure des coquelicots

Si vif encore est mon chagrin !

Comme Marguerite Baret-Léonard sait bien exprimer les tourments que cause cette plaie ouverte qui –on le sait – ne se refermera jamais.

Mais il ne faudrait pas croire que ces poèmes réunis ici ne sont que lamentations funèbres, chants de désespérance et d’abandon à l’enfermement d’un stérile chagrin.

Mourir, alors ?

Non ! Vivre ; que la liberté nous tienne debout.

La vie est là, oui, la vie et L’ardente innocence du monde.

La vie est là, non point pour effacer le deuil mais pour l’accompagner, le soutenir, l’aider à tenir bon. Non pour faire oublier l’absent mais au contraire pour l’associer à cette existence désormais mutilée de celui qui reste.

N’oublie pas les marguerites et les lilas.

Il y avait un grand jardin, souviens t’en

Un jardin et les oiseaux et le chat

Du voisin, le forsythia d’avant printemps…

Admirable poésie qui ne gomme ni la douleur présente, ni le lancinant souvenir, ni les pourquoi (pourquoi lui ? Pourquoi elle ? Pourquoi maintenant ?) restés sans réponse et qui conclut par ces merveilleuses paroles

Le cœur vacille entre noir et blanc ;

J’éteins la radio, il est temps

De vivre pour et malgré tout.

Les textes de Marguerite Baret-Léonard s’accompagnent de dessins et photographies de l’auteure illustrations essentiellement constituées d’arbres, de troncs dépouillés mais aussi de la légèreté des feuillages ou de la flamme d’un tronc qui danse.

J’aime beaucoup ces représentations de l’arbre, symbole de Vie, même pour celle qui clame

Mais je sais ce qu’est le temps de l’hiver

L’arbre reste vivant et se couvre de feuilles et d’oiseaux. Chaque ligne de ce beau recueil vibre d’élan et d’amour qui ne périra point lui non plus.

Écrire une fois, une fois encore écrire

« Je t’aimerai jusqu’à la mort »

Avant de mettre le point final.

L’écriture poétique de Marguerite Baret-Léonard est douce, fluide, sans fioriture et j’ai bien sûr le sentiment de ne pas avoir su en dire toute la lumineuse beauté.

Á vous de découvrir donc, ces vers qui m’ont bouleversée mais non attristée tant ils marient intimement l’arc-en-ciel de sourires et de pleurs dont se tisse toute existence humaine.

Le recueil est édité par Éditions Mémo-Lande (R.E.V.E) http://memocom.memolande.com

 

(Monique MERABET, 15 Septembre 2013)

 

Publié dans LIRE

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M
<br /> C'est tout simplement merveilleux!<br /> <br /> <br /> Quelle façon élégante de "tourner la page"<br /> <br /> <br /> Félicitations,quel cadeau pour la modeste lectrice que je suis.<br /> <br /> <br /> Danièle<br />
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M
<br /> <br /> Oui Danièle, un très beau livre de souvenance et de vivre "avec" l'absence.<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Beau texte très touchant. Un peu difficile en ce moment : en à peine six jours, trois deuils. Amis de vie, amis de plume...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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M
<br /> <br /> Toutes mes amicales pensées, Danièle.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> Encore un joli livre arboricole à découvrir !<br />
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M
<br /> <br /> Très émouvantes cette absence, cette séparation intimement liées aux arbres.<br /> <br /> <br /> <br />