En forme de...
EN FORME DE…
Trèfle de la chance
trois lobes rouges
en forme de cœur
Lire les taches laissées par les eaux de lavage dans la ruelle. Ce matin, la trace humide de l’arrosage nocturne de la voisine a une forme de cœur. Inventer un nom pour cette divination.
Il y a toujours une tâche urgente à faire en se levant…
Collectionner les taches en forme de cœur : à noter sur mon carnet pense-jour. Je garde déjà les cailloux, les fragments de corail, les feuilles répondant à ce critère. Cela fait si longtemps que je ne suis pas allée me balader en bord de mer.
Je regarde les nuages. Souvent, je me contente d’une flânerie en bord de ciel. C’est aussi bien ? C’est mieux ?
Mais les nuages en forme de cœur (Euh ! Il y a un adjectif pour ça ?), c’est rare ! Je ne me souviens pas en avoir jamais observé. « Un amas de nuages en forme de cœur se déplace d’Est en Ouest », cela ferait un joli bulletin météo, non ?
Allez ! C’est promis ! La prochaine cardioïde nuageuse, je lui saute dessus… clic ! clic ! clic ! Photos en rafales. Mais cela n’aura pas lieu ce matin, sous ce ciel encore dégagé, d’un bleu un peu pâlot, comme recouvert d’un voile uniforme : une brume impalpable, indiscernable à mon œil.
Holà ! Je me demande soudain s’il est bien raisonnable d’évoquer quelque chose que mes sens ne captent pas vraiment… Aïe ! Déformation haïkiste…
Pourtant, ce voile, impalpable, indiscernable, il est là. Je le sens, je le sais. Mon sixième sens ?
Il m’est bien utile ce « sens » supplémentaire. Je l’accommode à ma manière, suivant le besoin de l’instant. Une espèce de sens-jockey, bon à tout ressentir. Il me permet de voir l’invisible oiseau du feuillage, d’entendre l’inaudible silence d’une pierre, de sentir le parfum des fleurs de manguier ce matin… Pour le manguier, c’est vraiment un effet « sixième sens » avec mon nez bouché par un rhume d’entre-saison.
Temps changeant d’Août
les iris fleurissent
les jours pairs
Les oiseaux viennent derrière le paravent lorsque j’écris. Ils savent que mes mots sont incantations protectrices, formulées pour eux. Mes mots tiennent les chats à l’écart.
Passage de chats
des oiseaux, il ne me reste
que l’ombre et le chant
(Monique MERABET, 23 Août 2013)