Fukushima
(haisha Monique MERABET)
SOLIDARITÉ… JAPON
Le cœur offert au ciel
les fleurs de la mort
au bord du chemin
(Sôseki)
Ce haïku de Sôseki traduit les sentiments mitigés que m’inspire le Japon.
Mon âme oscille entre l’émerveillement pour ce monde de spiritualité et de poésie cristallisé dans le haïku et les affres d’une civilisation d’hommes robotisés (la discipline tant vantée), technicisés à outrance…
Ce déchirement entre les deux pôles que présente toute civilisation humaine, je le ressens davantage à travers cette série de catastrophes survenues sur ce petit coin de terre, de notre terre.
Au-delà de la compassion pour les victimes des séismes et du terrifiant tsunami, un nom me taraude comme un leitmotiv : Fukushima !
L’autre jour la petite Elisa de sept ans s’inquiétait de savoir si le tsunami, c’était fini ; sa mère l’a rassurée.
Maman le tsunami
c’est fini ? mon cœur se serre
Fukushima
Je n’arrive pas à émerger de la stupeur que génère ce désastre annoncé, déjà accompli : dans quelle proportion ? Les palinodies des gouvernants ne nous le révèleront jamais.
Tchernobyl… Fukushima… Á qui le tour ?
Pour notre planète, il s’est passé quelque chose d’irrémédiable, d’irréversible. Après tant d’autres blessures : pollution par le pétrole, les produits chimiques, les déchets du nucléaire… chaque jour et en tout lieu.
Et cela me fait hurler d’entendre les commentaires stéréotypés des experts technocrates « amoureux du Japon » (sic). Mais de quel Japon ?
Menace nucléaire
le Japon a toujours su rebondir
é-co-no-mi-que-ment
Rebondir, oui… On peut rebondir après une catastrophe naturelle quelle que soit son ampleur. Après un tsunami, un tremblement de terre, une tempête, une éruption volcanique, on pleure les morts et on reconstruit. La vie continue car les éléments qui se déchaînent ne laissent pas de traces délétères, ils ne détruisent pas la terre.
Tandis que là ! Je pense aux morts qui surviendront à cause des radiations, à plus ou moins long terme, aux cancers qui vont se déclarer toujours plus nombreux, au périmètre anathémisé où rien de sain ne poussera plus d’ici longtemps, aux océans empoisonnés… jusqu’où ? Les eaux n’ont pas de frontière.
Ma maladie atomique
ne guérira jamais
clair de lune
(Ishi Funazu)
Un des « haïkus de la bombe atomique » extrait de l’Anthologie « Haïjins japonaises ». Nous faut-il les revivre, encore et encore ?
Raison de plus pour se sentir solidaire des Japonais, nos frères humains plus que jamais. Tous engagés dans la même aventure de vie terrestre que rendent si périlleuse les apprentis sorciers de toute nationalité. Alors, pour terminer sur une note plus optimiste :
Averse de printemps
l’un contre l’autre ils vont
un parapluie pour deux
(Sôseki)
… Même si l’averse nous ne savons pas l’arrêter…
Monique MERABET (25 Avril 2011)