Fleur bleue

Publié le par Monique MERABET

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L’ÂME DU TROUBADOUR

(Monique MERABET)

 

 

 

 

Ainsi commence mon histoire, en plein cœur du pays cathare.

Sur une verte montagne, vivait une fabuleuse colombe toute auréolée de lumière. Elle accordait, disait-on, d’incomparables trésors à ceux qui savaient toucher son âme par quelque présent emblématique de ses nobles qualités.

Aussi, de l’aube au crépuscule, des contrées les plus reculées, on venait en foule déposer à ses pieds des ribambelles de poèmes dédiés à l’Amour, à la Paix, des brassées de rameaux d’olivier, de roses blanches, de lys immaculés, des pléiades d’arcs-en-ciel… en un mot, tout ce que l’imagination humaine considérait être le symbolique reflet de l’oiseau courtisé.

Mais la belle – qui n’était pas dupe de leurs cupides pensées – disait toujours avec un haussement d’ailes :

- Nenni ! Nenni ! Hypocrites que vous êtes ! Ôtez vos pas d’ici ou je vous change en lourdes pierres que les crapauds et les vipères prendront pour abris.

Et les prétendants, faux poètes, calculateurs, s’enfuyaient sans demander leur reste.

 

Un beau matin, un jeune troubadour, se laissant guider par la fantaisie de sa joyeuse errance, prit le sentier qui menait à la montagne enchantée.

Au bord d’un clair ruisseau, il cueillit une gentiane encore tout emperlée de la rosée de l’aube ; il l’accrocha au pommeau de sa canne et put ainsi contempler le bleu de la robe satinée, tout au long de sa randonnée.

Á l’angélus, quand le ciel se pare d’ors et de rubis, il aperçut dame colombe dans toute sa beauté et il en fut ébloui. Il la salua de courtoises paroles et offrit à la belle la corolle couleur de ciel.

La colombe, surprise par la simplicité du cadeau, l’interrogea :

- Crois-tu, jeune insensé, que je te livrerai mes trésors contre si modeste obole ? Dis-moi, de ta fleurette, quel est le symbole ?

- Je ne sais pas trop, répondit le troubadour. Cette gentiane, je l’ai cueillie parce que je la trouvai belle. Toute la journée, elle a réjoui mon regard et m’a rendu l’ascension plus facile ; elle a rempli mon esprit de pensées légères comme des chansons. Je te la donne pour que tu puisses, à ton tour, abreuver tes yeux de leur exquise fraîcheur.

 

Alors, la colombe, séduite par la lumineuse innocence de ces paroles, devint l’âme du troubadour.

Et, depuis lors, le poète s’en va chantant, émaillant les chemins alentours de l’harmonie de ses poèmes ciselés avec amour comme d’étincelants joyaux.

 

(Monique MERABET)

 

 

Publié dans INNOCENCE

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M
Oh quelle belle légende !<br /> Puissent le troubadour et la colombe habiter ma pauvre petite âme d'apprentie poète !
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I
Quelle poésie dans cette histoire de fleur bleue qui me rappelle celle d'une autre fleur aux couleurs du ciel &quot;forget me not&quot;, celle d'une fiancée qui a attendu si longtemps le retour de son amoureux parti à la croisade qu'elle finit par prendre racine le long du chemin.<br /> <br /> Merci pour cette poésie qui apporte le rêve et la musique à notre monde trop réel
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M
Ré-enchanter le monde grâce à la fée écriture. C'est ma seule ambition.
D
Et moi, je suis séduite par tes lumineuses histoires, Monique. Félicitations !
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M
Merci Danièle
P
<br /> Après la douce lecture de ton histoire, Monique, je rêve, sans doute comme toi, d'un monde de poètes aux coeurs aussi zen que celui du troubadour. Voilà qui nous changerait notre<br /> quotidien. Huguette <br />
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M
<br /> <br /> D'accord avec toi, bien sûr. Mais encore faut-il que les poètes veuillent bien suivre l'exemple du troubadour. Je suis toujours étonnée de voir ici ou là des prétendus poètes bouffis d'orgueil et<br /> de mesquinerie... quand ce ne sont pas des bourreaux...<br /> <br /> <br /> <br />