La couverte de coins
La couverte de coins
(Monique MERABET)
(image Flickr)
Inn ti kouvèrte do koin
pou shof mon kor
shof lo kër osi
Juillet. L’hiver austral… Le vent s’insinue par le moindre interstice et il n’en manque pas à mes volets de bois dont la construction remonte à plus de cinquante ans. Dans la chambre, la température a chuté : seulement 23°… C’est sibérien.
J’ai donc trouvé plus sage de ressortir la « couverte de coins » héritée de mes parents. Je les revois encore recroquevillés dans leur fauteuil devant la télé ; ils s’en enveloppaient comme d’un plaid.
La couverte de coins : une véritable institution réunionnaise, du moins dans ces familles où l’on était obligé de « compter », où la récup était affaire de survie. Ainsi j’ai toujours vu ma grand-mère occupée à assembler d’hétéroclites rectangles de chiffons prélevés sur les vieux habits qu’on ne pouvait décemment plus rapiécer. Rien à voir avec les savants patchworks ni même avec le « tapis mendiant » fait d’un pavage d’hexagones qu’on réunit avec un souci artistique évident. Là, pour les coins, on découpe les rectangles de tailles différentes, de façon à pouvoir récupérer jusqu’au moindre carré de ce précieux tissu.
Et puis le baroque quadrillage était doublé de finette, une espèce de coton flanellisé qui donnait une impression de chaleur et de douceur.
Et c’est vrai qu’on se sent bien au sein de ce cocon où toute la famille est représentée parfois jusqu’à une lointaine aïeule disparue et qui a laissé en héritage, un petit bout de sa robe ou de sa chemise de nuit.
Et je ne vous raconte pas les beaux rêves !
Carré de couleur
au bout de mes doigts qui rêvent
les souvenirs