LAMBREQUINS ET VIEUX BARDEAUX (10)

Publié le par Monique MERABET

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Mémoires d'une vieille case  créole 5

 

Aujourd’hui, je renais à la vie grâce à Arthur et à la bande de galopins qui l’ont suivi.

Quelle frayeur quand je vis débarquer sur mon territoire cette horde de sauvageons braillards et débraillés, dont les crânes dénudés – drôle de mode ! – accusaient les regards un peu trop hardis. Cela m’a fait un choc ! Dans le temps, c’est ainsi qu’on se débarrassait des poux. J’ai craint d’être contaminée.

Il y eut au départ, quelques moments pénibles pour mon amour-propre. J’essuyais de vexants quolibets : « bicoque pourrie », « vieux tas de ruine », « obsolète »…

Mon bienfaiteur lui-même ne fut pas épargné et se fit brocarder à coup de « T’es complètement dingue » et « Tu nous prends pour S.O.S Débris, ou quoi ? »

Pour me venger je pinçai quelques doigts malhabiles dans a bascule des volets ; je tordis quelques chevilles dans les interstices de mon plancher désagrégé par endroits.

Par la suite, les choses se sont arrangées, et de belle façon !

Ah ! Croyez-moi, sous leurs airs décontractés, ce sont de sacrés bûcheurs, ces petits !

Mon aire débroussaillée est devenue parc et les bougainvillées domestiquées tressent de jolies corbeilles autour des grands arbres ressuscités.

Pour ma part, j’ai subi une véritable cure de jouvence et j’ai fière allure lorsque mes portes rajeunies tournent sans grincer sur leurs gonds bien huilés et s’ouvrent sur les parquets luisants comme miroir des salons rénovés. C’est avec une intense jubilation que j’accueille alors les musiques plurielles des enfants « toucouleurs » que j’ai volontiers adoptés.

Oui, ils appartiennent bien à mes descendants, tous ces yeux clairs, tous ces yeux sombres, ces cheveux de paille ou de jais, ces toisons lisses ou crépues… qui communient sans complexe dans la diversité de leurs harmonies.

Mais je ne vous le cache pas, mon préféré c’est Arthur ! Il est trop craquant ce garçon ! Savez-vous la surprise qu’il m’a mitonnée dernièrement ?

Pour l’inauguration du Centre Artistique Socioculturel Ethnographique que je suis devenue, il a invité les banjos, accordéons et violons d’un groupe de musique ancienne et, rien que pour me faire plaisir, ils ont ressuscité un bon vieux quadrille d’antan.

Un quadrille ! Mon péché mignon !

Mes lambrequins et mes vieux bardeaux en ont délicieusement frissonné d’émotion.

 

FIN (de l"épisode)

Publié dans LIRE

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Commenter cet article
M
<br /> Oups ! déjà la fin ? Dommage - je m'attendais à une description détaillée des travaux de réparation, réfection et rénovation de cette vieille case créole - et de toutes sortes de péripéties qui<br /> se seraient déroulées lors de cette démarche de sauvegarde du patrimoine...<br />
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M
<br /> <br /> Mais non Monika! L'été n'est pas fini, le feuilleton non plus...<br /> <br /> <br /> Et crois-moi, côté intrigue, ça ne fait que commencer!<br /> <br /> <br /> La restauration de maison "en détail", ce n'est pas mon fort. J'use et j'abuse des prérogatives de L'AUTEUR (c'est moi! C'est moi!) pour faire défiler le temps à son gré et pour la vieille<br /> case... Hop! En deux tours de stylo magique, revoilà la maison sur pied!<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> T. Bien.<br />
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M
<br /> <br /> Merci Professeur!<br /> <br /> <br /> <br />