LAMBREQUINS ET VIEUX BARDEAUX (30)
LE PENDULE DE GREGOIRE 3
Á midi, il fallut se rendre à l’évidence : les recherches étaient demeurées vaines.
Malika, Maryline, Vanessa, Mathieu, Hakim et Willie s’étaient partagé l’espace à ratisser. Ils avaient passé la maison au peigne fin, examinant le mobilier sous toutes les coutures ; ils avaient inspecté toutes les cachettes possibles jusque dans les cavités des vieux troncs ; ils avaient battu les broussailles de galabèrs et de lianes poc-poc qui avaient envahi la partie du terrain encore en friche ; ils avaient soulevé des portées de cent-pieds et de scorpions… sans compter les couleuvres que les filles avaient affrontées stoïquement, pour une fois. Crottés, harassés, égratignés de toutes parts, ils étaient revenus bredouilles et maintenant, ils rentraient chez eux pour la pause déjeuner.
Sans exception, ils avaient tous promis à Vanessa de revenir l’après-midi. Mais la jeune fille était profondément abattue. Elle ne savait plus à quoi se résoudre. En dépit des apparences, Kouri avait dû se glisser à l’extérieur par une brèche insoupçonnée.
Il ne restait qu’un faible espoir : placarder des affiches dans tout le quartier ; mais elle n’ y croyait guère.
Comment oserait-elle affronter la douleur d’Héloïse si on ne retrouvait pas Kouri ?
Greg tira sa tante de ses sombres pensées.
- Ness… on peut essayer mon pendule.
Il exhibait au bout d’une chaîne dorée, un objet oblong en métal argenté serti de « pierres de magie », une des pièces de la panoplie du petit magicien qu’on lui avait offerte à Noël.
Vanessa n’eut pas le courage de se moquer de son neveu. Et puis, au point où ils en étaient…
- Vas-y si tu veux, mon chou. Ensuite on ira s’acheter une pizza.
Le grand Devin Grégoire procéda avec toute la solennité que requerrait une telle mission. Il se fit une cape d’un napperon, imprima à son instrument un mouvement de balancier… comme pour lui indiquer ce qu’on attendait de lui.
Avant d’entrer dans la maison, il se recueillit sur le seuil en proférant les incantations magiques préconisées par le manuel du parfait magicien :
BA BI KOU BA BOUKI KOURI KOURI
Enfin, tenant le pendule sacré à bout de bras, il entreprit de faire le tour de chacune des nombreuses salles de la maison.
Le pendule demeurait immobile.