LAMBREQUINS ET VIEUX BARDEAUX (31)
LE PENDULE DE GREGOIRE 4
Vanessa commençait à s’impatienter et lorsqu’ils arrivèrent devant la resserre qu’Héloïse avait occupée, elle voulut arrêter là ce qui n’était à ses yeux qu’une « mômerie ».
- Ici, ce n’est pas la peine, Greg. Tu penses bien que la pauvre Héloïse a dû commencer ses recherches par ici.
Grégoire se rebiffa :
- Ah ! Non ! Il faut passer partout, sinon la magie ne marche pas. Ce matin, Malika m’a bien lu le mode d’emploi sur la boîte.
Résignée, Vanessa le suivit.
- Ça bouge, Ness. Ça bouge ! s’exclama Greg. Le pendule ! Il bouge !
Incrédule, la jeune fille vit le bidule tournoyer entre les doigts du « Devin », de plus en plus rapidement.
Greg s’immobilisa devant le godon.
- Il est là, dit-il, retenant son souffle. Il est là ! Le pendule a failli me tomber des mains.
Suivant les indications du pendule, il se glissa sous la dernière étagère.
- Ness, il y a un trou… Et j’entends comme quelqu’un qui pleure.
Vanessa introduisit à son tour sa tête dans l’encoignure. Il y avait effectivement un trou, assez grand pour laisser passer un animal de petite taille comme Kouri. Et, mon Dieu ! elle aussi elle avait cru entendre gémir.
Se saisissant d’une barre de fer qui traînait par terre, elle descella les tablettes. On y voyait plus clair.
Le fond du placard était constitué de planchettes mal équarries, rongées de moisissures. Il avait été recouvert d’une mince couche d’un enduit de piètre qualité qui s’effritait par endroits.
En tapant dessus, Vanessa réussit à élargir l’ouverture et découvrit une sorte de cave peu profonde qui avait pu servir de cachette pour de l’alcool ou du tabac de contrebande. Le plancher devait être amovible et, débarrassé de son léger béton, servait de trappe.
Á la lumière d’une torche électrique, Vanessa aperçut une tache noire qui palpitait au milieu des gravats jonchant le sol.
Kouri était là… et vivant !
Ne restait plus qu’à le récupérer. Mais comment ?
Après quelques tentatives infructueuses pour se saisir du chiot – ses bras touchaient à peine le fond et la pauvre bête terrorisée, ne bougeait as du coin où elle s’était réfugiée – Vanessa se résolut à aller chercher de l’aide. Mais à cette heure, tout le monde était allé déjeuner ; elle aurait du mal à trouver promptement du secours.
Ce fut Greg qui apporta la solution, une fois encore.
- Je peux passer, moi, par le trou que tu as fait ; je peux aller chercher Kouri. Tu nous remonteras.
- Dis oui, Ness ! supplia-t-il.
Après ses initiatives malheureuses de la veille, Vanessa hésitait faire descendre le petit garçon dans cette cave obscure, sans savoir à quel danger il serait exposé. Mais le temps pressait. Et si Kouri était blessé ?
- O.K, décida-t-elle. Mais tu fais bien attention, hein !
- Pour plus de sécurité, je vais t’attacher dit-elle, en avisant un rouleau de fil électrique : ce sera bien assez solide pour retenir un farfadet comme toi en cas de chute.
Elle assujettit aussi la torche autour de la tête de Greg qui devrait ramper pour atteindre l’animal.
Et le petit garçon qui se sentait l’étoffe d’un héros mythologique, plongea dans les entrailles de la terre.
Le sauvetage ne dura que quelques minutes, heureusement.
Kouri, qui ne semblait pas blessé, se blottit avec reconnaissance contre son sauveur.
Greg tendit alors à Vanessa une bouteille en verre bleu dépoli recouvert d’une épaisse couche de poussière agglomérée ; le clip du bouchon était complètement rouillé.
- Regarde Ness ! C’est sûrement le plan d’un trésor.
Attendrie, Vanessa lui sourit.
- Super ! On verra ça plus tard, mon cœur. J’appelle Héloïse.
(dessin Huguette PAYET)