Les fleurs du cimetière
LES FLEURS DU CIMETIÈRE
Portail du cimetière
un grolay vient mourir
en plein ma photo
Avant même la première gorgée de café, le stylo court sur la page blanche offerte. Raconter la belle flânerie d’hier parmi les tombes-parterres fleuries du cimetière des Avirons, le plus beau cimetière à ciel ouvert (pourrait-on dire) que je connaisse.
Variété de corolles entremêlant leurs formes leurs couleurs pour ces élégantes et aériennes compositions !
Exhalaisons des âmes des défunts qui reposent là ? Pieuse souvenance qu’entretiennent les vivants dans la magnificence de ces jardins épanouis au soleil de Novembre. Hommage des frangipaniers parsemant le allées de sable des fleurs embaumées roses ou crème.
Dos courbé
les dernières arroseuses
du cimetière
Les dire avec des fleurs, les attendrissantes pensées qui nous relient encore à des généalogies plongeant au plus intime de notre terre de Réunion. Souvenances plus précieuses que ces lettres dorées gravées sur les dalles grises. D’ailleurs, il est à noter que les anciennes croix parfois maladroitement argentées où s’inscrivaient le nom de l’aïeul, n’y trouvent plus leur place : on les cache –honteusement ? – derrière le monticule en stuc, laideur et modernité.
Plus de croix ! La déchristianisation suit son chemin, érode le grain de spiritualité qu’il nous reste.
Á la cime
des vieux cyprès
les rameaux en croix
Me viennent ces quelques vers. Brassens, encore Brassens, toujours Brassens, chantre incontesté de nos errements, prophétique bien souvent :
« Un beau jour on va voir le Christ/ descendre du calvaire en disant dans sa lippe / Merde ! Je ne joue plus pour tous ces pauvres types ! / J’ai bien peur que la fin du monde soit bien triste ! »
Pincement au cœur
au départ du cimetière
ceux qui restent
Mais pourquoi pleurer ? Pourquoi regretter ? … zéternellement en plus ! Il n’y a rien à regretter puisque ce monde que j’aime, je le porte en moi comme un présent de chaque instant,, comme un viatique. Et qu’il disparaîtra avec moi.
Toutes ces fleurs à l’ombre des frangipaniers et des buis de Chine : sérénité peuplée d’oiseaux et d’insectes. Et tout finit par des haïkus.
Toutes ces fleurs !
les oiseaux et moi
nous disputons quelques graines
Du cimetière
elle ramène une balle
de tennis – neuve !
(Monique MERABET, 11 Novembre 2011)