Perrette et la télévision
PERRETTE ET LA TÉLÉVISION
Perrette, en son logis, songeait ;
Elle s’ennuyait, peut-être.
Dame Télé, par la fenêtre,
Lui tint ces propos effrontés :
« Comment ! Vous demeurez seulette,
Á savourer vos propres pensées ?
Ah ! Non ! Pas de ça, Perrette !
Aujourd’hui, il faut com-mu-ni-quer…
Invitez-moi. Je saurai vous distraire,
Vous informer… je suis bonne à tout faire. »
Alléchée par ces prometteuses merveilles,
Perrette, naïvement, prêta l’oreille
Aux paroles aguicheuses.
Elle ouvrit sa porte à l’envahisseuse.
Et bientôt, toutes ses journées
Furent soumises aux caprices de l’invitée :
Plus de lectures au creux de la causeuse,
Le soir, en regardant pétiller le feu ;
Plus de discussions affectueuses ;
Finis les contes et les jeux.
Plus de ces doux moments
Où l’esprit s’en va flânant
Sur les routes de l’imaginaire.
Hélas ! Tous ces beaux plaisirs de naguère
Furent sacrifiés
Á la brailleuse de vulgarité :
Clips en boucle, publicités,
Feuilletons, fausses stars et fadaises,
Images voyeuses qui mettent mal à l’aise.
Zappez ! Zappez ! Zappez !
Jusqu’au jour où l’hôtesse dégrisée,
Envoya paître sur les roses
La boîte à décerveler.
Salutaire sursaut !
Et depuis, l’antenne forclose
Sert de perchoir aux petits oiseaux.
(Monique MERABET)
... aux petits oiseaux. Et aux liserons!