Souvenir d'églantine
LE PARFUM DE L’ÉGLANTINE
vent printanier
la douceur de l’églantine
dans son souvenir
Ah ! J’étais fière d’offrir à Pépé Bertrand, ce haïku. Il fêtait son centième anniversaire aujourd’hui et, sortant de son apathie habituelle, il nous avait raconté quelques événements de sa lointaine enfance. Petit garçon, il cueillait des bouquets d’églantine pour sa mère et, impatient de lui apporter son offrande parfumée, il courait à travers champs et pâtures, si bien qu’en arrivant, les fragiles pétales s’étaient tous envolés... Ne restait sur ses doigts que « l’odorant souvenir ».
Pépé Bertrand, c’est lui qui m’avait offert mon premier livre de haïkus et je m’étais appliquée à mon tercet : il n’y manquait ni la césure, ni le kigo.. et je m’attendais à ce qu’il me félicite.
Au lieu du compliment espéré le visage du vieil homme s’est soudain fermé et, tout le reste de l’après-midi, il est resté comme absent plongé dans un monde intérieur douloureux.
Je n’ai compris que bien plus tard : « vent printanier » était le nom de code de la rafle du Vel d’Hiv en juillet 1942.