Rangement... urgent

Publié le par Monique MERABET

Rangement... urgent

RANGEMENT… URGENT

 

 

 

Un peu partout dans les médias, conseils de lecture pour confinement : articles alléchants des journaux, des magazines — lisez-moi, lisez-moi… —, listes d’ouvrages à découvrir, redécouvrir, appels fervents et complètement décalés d’intellectuels déconnectés de la triste réalité d’un monde non lecteur à « l’ouverture des librairies »… et bien sûr, dénicher dans les trâlées d’ouvrages confinés sur les étagères de nos bibliothèques, la perle rare non encore lue.

Au passage, j’ai appris le mot japonais tsundoku, qui signifie « accumulation sous forme de piles, de livres qui ne sont jamais lus ». Il serait issu d’un terme d’argot de l’ère Meiji… Quelle ascendance !

Le vocable à peine découvert, est adopté pour désigner mon désordre livresque, étagères bondées (j’ai changé celles en contreplaqué qui ployaient jusqu’à la rupture, contre du vrai bois), colonnes menaçant de s’effondrer si un geste un peu brusque les mettait en branle.

Tous ces ouvrages que je qualifie pudiquement de « pas encore lus » — mais combien d’entre eux ont été acquis pour la beauté d’un titre, pour faire plaisir à un auteur en dédicace, combien me tomberont des mains au bout d’une feuilletée de pages ? —, tous ces empilements vertigineux s’ennoblissent d’un assemblage (ordonné) de kanjis japonais… quelque chose de nippon, ma chère, de quoi rasséréner et combler la haijin que je suis.

Un mot qui semble avoir été créé exprès pour moi qui pratique à haute dose l’art des entassements. Heu… il y en a un pour désigner les monticules de linge à repasser ?

Mais là, il m’est facile de refermer la porte du local qui les abrite : cachez ces vêtements que je ne saurai porter ! Revenons aux livres.

J’ai suffisamment d’ouvrages à découvrir, vivrai-je encore longue suite de décennie. Et quand on sait qu’un livre peut se relire et relire encore…

Ah ! Mon seul souci, confinement ou pas, c’est de trouver du temps pour le faire. Ô temps suspends ton vol !

 

Et quand on écrit, par surcroît !

 

« Moi, je connais un poète, un poète de Beauvais* qui, manifestement, écrit pour vivre, pour exister par et avec la poésie. Et les poèmes de chaque jour s’empilent, classeur après classeur, en impressionnants piliers. De quoi se bâtir une maison en murs de poésie ! » (extrait de Parenthèse d’automne, Monique Merabet, éditions Muse, 2019)

*Jean-Claude Bardot

(Petit journal de confinement 8, 24 mars 2020)

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