Crossandra

Publié le par Monique MERABET

Crossandra

CROSSANDRA

 

 

La tête me tourne

trop vite les cumulus

se métamorphosent

 

Le nom des nuages que je recherche et que j’oublie de façon récurrente. Je n’ai guère le don des observations scientifiques, ainsi ces espèces que je ne reconnais pas à partir d’une photo.

Je n’ai de mémoire que pour l’abstraction des mathématiques. Pas mes élèves, hélas ! qui oubliaient toujours les définitions, confondant centre de gravité, orthocentre, centre du cercle circonscrit… Peut-être étaient-ils affectés du même défaut que moi, mais appliqué à l’abstrait.

 

Fleur orange

j’ai appris ton nom

t’aimer mieux

 

Je devrais me constituer un herbier poétique du jardin, sans rien prélever, bien entendu. Une photo et un haïbun. Dans ma tête il a déjà belle allure.

Tiens ! parler du crossandra, par exemple.

La plante poussait un peu partout, à mon arrivée au jardin de la rue d’Après ; elle gratifiait chaque coin du jardin de l’orange lumineux (mais pas flashy) de ses fleurs.

J’ai demandé son nom autour de moi. le mépris : « Ça, Madame ? Ça, c’est une peste à arracher.

Bien entendu les arbustes sont restés sous ma protection. Je les arrosais régulièrement et m’étonnais de recevoir en retour une pluie boomerang. J’ai mis du temps à comprendre que les épis du crossandra libéraient leurs graines dès les premiers indices d’humidité. Leur hygromètre intégré est très sensible… à chaque végétal, son astuce pour assurer la préservation de l’espèce.

« Savez-vous planter des choux/ à la mode de chez nous ? », la comptine symbolique va bien au-delà des techniques potagères acrobatiques.

Quant au nom de la plante, je l’ai appris de visu en lisant une étiquette au marché aux fleurs.

Regards soupçonneux de la marchande « Touchez pas ! » et son indignation lorsque je me suis écriée : « J’ai le même chez moi ! »

« Le même, sûrement pas ! », a-t-elle craché. « Celui-là est double. »

Double : qualificatif fort qui ennoblit la maîtresse de jardin qui le possède.

 

La photo suffit

sortir enfin la fleur orange

de son incognito

 

Je suis rentrée chez moi, retrouver mes « simples » crossandra. Ils n’avaient rien perdu de leur éclat.

J’ai appris aussi le tinon gaté que lui donne la fantaisie créole : flèr pétar ! Joli, non ?

 

(6 septembre 2021)

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