Dimanche, on tourne... les pages 14(6)
Haïkus d’enfant et de rainette
(gilles brulet/chiaki miyamoto)
Hiver pluvieux de France. Et bien sûr, il fallait s’y attendre…
averses de Mars
sur la mare de Plouy*
pluie de rainettes
*Plouy : c’est Plouy Saint-Lucien (Beauvais dans l’Oise) et sa mare bordant les Éditions L’iroli (www.editions-liroli.net )
C’est de là que nous arrive ce ravissant album
Haïkus d’enfant et de rainette
Ravissante, délicieuse, époustouflante, magique, fantastique… cette parade de haïkus de Gilles Brulet, mise en « onde » par Chiaki Miyamoto. Les deux auteurs de « Haïku mon nounours » publié aussi chez L’iroli.
Les textes ciselés en 5-7-5 donc, de vrais petits bijoux de haïkus nous plongent dans l’univers d’une mare poétique où évoluent l’enfant, Petit Prince venu du monde enchanté de l’enfance, et la rainette, ondine tutélaire pour un quotidien de jeux et de joies.
plongeon de rainette
éclaboussures d’étang
et de cris d’enfant (gilles brulet)
Cette plongée dans un univers de bonheurs aquatiques m’enchante et me retient captivée, sensible aux moindres variations du temps qui passe du soleil à la lune, de l’hiver qui fuit au printemps des lys et à l’été des vacances… petit voyage intemporel « appuyé au ciel »… Comme elle est belle la vie ! Le temps de suivre un arc-en-ciel, je suis enfant et rainette.
saut de la rainette
parallèle à l’arc-en-ciel
enfant enchanté (gilles brulet)
Le rythme classique choisi par l’auteur donne à ses lignes une harmonie mélodique. On a envie de les entendre ces haïkus, de les chanter. Coa ? Je n’ai jamais entendu de rainettes mais je ne doute pas que leur chant soit doux et beau, montant dans la nuit étoilée.
De les danser aussi et là, les délicieux dessins au crayon de Chiaki tout en mouvances et en lumières, nous aident à y glisser nos pas. Ah ! la fluidité des traits qui font nager, voguer enfant et rainette au fil de l’eau !
Et les teintes crayonnées, si légères et si chaudes à la fois ! Ma préférence va à cette cour d’amour aux coquelicots de la première page. Je suis la petite fille à la fenêtre…
La subtilité des illustrations accompagnant les textes en fait de véritable haïgas où le dessin suggère, accompagne le haïku sans pesanteur, comme un chant d’oiseau qui jamais ne blesse le silence.
Et mon joyeux Dimanche à savourer ces rainettes qui Hop ! Hop ! Hop ! ont vite franchi les océans pour atterrir dans l’herbe si verte de mon été austral. J’ai cru les entendre derrière mes volets ce matin…
« C’est le record absolu de vitesse de saut de grenouille » m’a dit l’éditrice.
Petit conseil d’amie (des enfants, des rainettes et des haïkus) : Fermez vite vos parapluies afin d’accueillir les petites rainettes bleues… il y en a vingt-huit dans chaque album.
(Monique MERABET, 2 Mars 2014)
PS : je n’ai pas parlé de la résonance avec le vieil étang de Bashô le haïku le plus célèbre du monde, mais j’y ai pensé. Cet ouvrage constitue une magnifique variation sur le thème.