Exsangue

Publié le par Monique MERABET

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Exsangue

(Rosemay NIVARD)

 

 

 

Editions L’Harmattan (2011)

 

Quatrième de couverture

 

Peinture musicale de la douleur d’être à l’hôpital pourrait décrire ce recueil où le titre « Exsangue » nous convie déjà à une extirpation de l’auteur à sa vie propre pour se glisser dans ses personnages. Extirpation de la couleur réelle quand le vert représente la mort, « Mon petit jockey » est le texte qui relie le plus à ses livres précédents ; Rosemay Nivard nous parle encore d’une musique qu’elle essaie de comprendre et qu’elle qualifie d’étrange, celle de la vie et de son sens. Peinture, photo, randonnée le long de la Marne, matériel à méditation, préparation d’atelier, le voyage d’Exsangue est vraiment sur le terrain hospitalier banlieusard.

 

Rosemay Nivard est née en Mai 1961 à l’île de la Réunion, installée dans la région parisienne depuis plus de trente ans. Après des études classiques, elle opte pour un voyage auprès d’êtres en souffrance mentale, une infirmière qui va d’abord écrire son île natale, en quelques recueils et qui va ensuite nous mener vers son quotidien hospitalier.

 

Mon avis

 

Comme le dit la mini biographie qui figure en quatrième de couverture, c’est bien à un voyage que nous invite Rosemay Nivard. Dès que nos yeux se posent sur le premier poème du recueil « Exsangue », nous savons que nous nous sommes embarqués pour un monde inhabituel et nous savons aussi qu’il ne s’agira pas d’une randonnée touristique, qu’il y aura

 

« Un vide

Á notre randonnée ».

 

Le vide que laisse au cœur l’évocation de vies brisées d’ados,  de ces « je suis au bout du rouleau », de ce temps qui fuit les mémoires et « la mort en filigrane »

 

« Des histoires à dormir debout

Des contes inachevés

Des phrases parfois dépourvus de sens

De ces mains flétries

Des questions, les mêmes inlassablement

En boucle »

 

Cet univers d’hôpital, de rencontres mal de vivre, mal d’être, Rosemay Nivard,  nimbée de sa blouse blanche, l’évoque sans pathos et sans moralisation mais ce n’est pas un diagnostic clinique froid et impersonnel qu’elle dresse. Son regard est toujours chaleureux et ses mots savent nous intéresser aux personnages de son entourage qu’ils soient malades ou passants de rencontre.

 

« Ma main

Serre les vôtres

Et tâche d’y mettre

Un peu de vie

Dans ce couloir d’hôpital »

 

Elle se contente d’être là, présente. Elle habite son métier d’infirmière et sa poésie sobre en parle sans fioritures. Pas de trémolos, pas de lyrisme, encore moins d’envahissante empathie. Je gage que si Rosemay avait été jardinière elle aurait parlé de ses fleurs et de ses fruits avec la même simplicité, la même tendresse.

Sa poésie se fait discrète pour laisser à chacun sa part d’humanité intacte… y compris la sienne propre. Car elle s’implique, Rosemay, ses textes parlent d’elle aussi. Et sa métrique se calque sur sa musique intérieure, tempo accordé aux battements de son cœur.

J’aime cette poésie vraie et tellement vivante. Je suis heureuse d’avoir pu la rencontrer, d’avoir partagé un peu de ses joies, de ses larmes aussi.

 

« éclat de rire

et je repars

dans mes blagues de tous les jours… »

 

«  je n’entends que

le crépissement

Acerbe de la larme

Le long de ma joue »

 

Il y aurait encore tant à dire, tant à citer de ce recueil devenu pour moi livre de chevet, chaque poème méritant qu’on le lise, le relise, qu’on s’y arrête.

 

(Monique MERABET, Octobre 2011)

 

Rosemay NIVARD a écrit aussi :

- Poésie couleur insulaire (édition Le Vert Galant, 2004)

- Douleurs et Poésie créole (édition Le Vert Galant, 2004)

- Spiritualités (ouvrage collectif, Le Vert Galant, 2005)

- Océan indien, Poèmes terba aux senteurs créoles ( édition les Xérographes, 2006)

- Á fleur de peau (éditions les Xérographes, 2006)

- Voyages intérieurs, Poèmes sous les feuilles (édition les Xérographes, 2008)

- Pommes d’hôpital, Rêverie sur le pont (édition les Xérographes, 2010)

 

 

 

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